Le Baptême, une peinture symboliste ?
- bohleremmanuel
- 9 janv. 2021
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile (Mc 1, 7-11) pour le Dimanche du Baptême du Seigneur (année liturgique B), célébrée le dimanche 10 janvier 2021.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO, au sein de l'édition du 08 janvier 2021.

« Nature morte au poisson, pain et bouilloire » (1772?)
Le récit du baptême du Seigneur mérite que l'on s'attarde à ses détails pour comprendre comment la composition de cette toile de fond est source de vie. Comme une nature morte, chaque objet possède une place essentielle et signifiante.
Dans le texte du baptême de Jésus selon saint Marc, tel un coup de pinceau, il y a un mouvement général vers l'abaissement.
Puis il y a ces objets disposés : des sandales, de l'eau, l'Esprit du Seigneur et la colombe, les cieux déchirés. Ils sont symboliques, surtout en pensant au livre d'Isaïe qui les a mis en scène. Si ce livre a été la trame des lectures tout au long de l'Avent, aujourd'hui il donne de comprendre cet épisode fondateur !
« Défaire la courroie des sandales » est une formule narrative qui évoque le déchaussement. Or Isaïe était reconnu pour être le prophète qui marchait nu et déchaussé (Is 20,1-6). Dieu demanda cela à son prophète pour annoncer à l'avance la chute de l'Egypte et de l'Ethiopie, entrainant un nouvel esclavage sous le joug assyrien. Plutôt que mettre son espoir en Dieu le peuple a préféré se détourner de lui et se fier à de vaines illusions. Les pieds nus sont à la fois signe de chutes (Is 59,7) et de chemins d'erreurs mais aussi d'une purification et d'un relèvement (Is 52,7) !
Quant à l'eau, elle est un élément récurrent dans le Livre d'Isaïe. Tout d'abord elle désigne la destruction et l'esclavage du peuple entrainant son exil (Is 8,6-8). Puisqu'il se détourne de Dieu (à travers le refus de l'eau de la grâce de la fontaine de Siloé) l'image de l'inondation annonce au peuple l’invasion de l'Assyrie. C'est aussi l'élément par lequel Dieu prend soin de son peuple qui souffre (Is 49,10), c'est un signe de vie (Is 41,18). L'eau désigne la libération et le salut que Dieu apporte (Is 12,3). Elle sera le signe du don de l'Esprit (Is 44,3). Enfin elle désigne, avec le vin et le lait, la nouvelle terre promise accordée par Dieu au moment du retour de l'exil (Is 55,1-3) désigné par la colombe (Is 60,8). C'est le retour à Jérusalem afin d'apporter des offrandes justes pour reprendre le culte au temple. La colombe est signe d'une Alliance nouvelle, d'un culte nouveau.
La très riche expression « Les cieux qui se déchirent » désigne l'appel d'un peuple qui souffre l'exil (Is 64,1). Mais aussi la venue de Dieu descendant sur sa montagne (Is 64,3) et allant au-devant de celui qui pratique la justice (Is 64,5) selon la Loi. Enfin, comme l’eau qui descend du ciel, elle annonce le salut et la délivrance qui jailliront de la terre (Is 45,8).
La concision si caractéristique de l'évangile de Marc provoque une condensation. Les extraits du livre d'Isaïe sous-entendus à travers les éléments sont comparables à des gouttelettes d'eau qui précipitent pour former un prisme focalisant la personne de Jésus de Nazareth. C'est en lui que l'Ecriture s'accomplit ! L'évangile résume admirablement le mystère de l'Incarnation ! Jésus est cette eau qui descend du ciel pour nous laver, nous libérer, nous sauver. Il nous montre le chemin de la justice par son exemple d'abaissement.
Si nous sommes assoiffés de justice, implorons-Le pour qu'il fasse pleuvoir l'eau jaillissante de l'Esprit !
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