Lettres à Théophile, "Passion ? Vous avez dit Passion ?" (5)

Chronique diffusée sur les ondes de Radio Jérico pour la rubrique "Commentaire d'Evangile". Libre commentaire de Jn 18, 1- 19,42, sous forme de dialogue entre Théophile et le narrateur.

Vendredi 06 avril 2012 (Vendredi de la Semaine Sainte).

"Jésus entre à Jérusalem ". Auteur inconnu

LETTRE DE THEOPHILE:

Salutation l'ami,

Cet Evangile me rend mélancolique à chaque fois que je l'entends.

Il décrit d'une façon très détaillée et très dure la souffrance qu'a dû ressentir Jésus.

Mais pourquoi devait-il passer forcément par la mort pour nous sauver ? …

Alors que les soldats romains et je peuple juif le méprisaient à un très haut point, j'aurais pu admettre qu'il doive mourir mais de là à ce qu'ils le fassent souffrir de façon totalement irrespectueuse et à l'humilier de façon inhumaine…

Ma deuxième réaction vive en lisant l'Evangile, c'est que j'ai l'impression que Pilate, malgré qu'il n'ait trouvé aucun motif, se soumet à la volonté du peuple. Il retourne sa veste très rapidement mais pourtant lorsqu'il fait écrire par-dessus la croix « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs » il le défend et réplique « Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit ».

Pourquoi ces contradictions ?

Heureusement que pour s'opposer à toutes ces péripéties, ce jour sonne le début des crécelles et des déambulations des servants d'autels dans les rues de notre ville.

Au moins un point positif ….

Dans l'attente de ta réponse.

Bien à toi.

Théophile

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REPONSE A THEOPHILE:

Mon cher Théophile,

La mort par la Croix était pour les romains une mort « exemplaire », c’est-à-dire que la cruauté pour un seul devait marquer et terrifier les autres pour qu'il ne fasse pas de même !

Je suis d’accord avec toi, mais dans l’Evangile de Jean que l’on entend tous les vendredis saints, on insiste pas tant sur la violence physique que sur la violence verbale !

Les expressions du peuple manifestent une telle hystérie vis-à-vis de Jésus et une telle haine, que les paroles à son égard semblent tout aussi cruelles que les humiliations physiques.

Jésus connait d’un homme, toutes les peines et toutes les souffrances possibles….

Je me demande comment, humainement a-t-il pu tenir…

Sa force et son silence mises en relief par le récit évangélique de Jean m’impressionne tout autant. Quelle force intérieure pour rester dans un tel silence, sans crier sa désolation….

Ensuite tu te poses la question de Pilate…

Effectivement sa figure est elle aussi ambigue…

Il semble comme tu l’as bien vu, jouer sur 02 plans.

D’une part pour raison d’état et de paix civil, il a laissé un innocent condamné. Il est clair que les aller-retour entre Jésus et la foule, comme ses interventions de médiation, semblent montrer qu’il est plus du coté de Jésus, parce qu’il connait son innocence.

Mais il n’empêche pas sa mort, pour ne pas créer une émeute encore plus hystérique.

Extérieurement Pilate semble bien préférer la logique du « bouc émissaire » mise en place par les autorités religieuses (Grand-Prêtre et Sanhédrin). C’est-à-dire on charge quelqu’un de toute la haine du peuple et on l’envoie dans le désert en sacrifice de purification. Jésus sera chargé de toute la haine possible, conduit à la croix hors de la ville, en sacrifice pour la paix civile…

Cela laisse perplexe effectivement…

Par contre, il se passe autre chose en son for intérieur.

Il impose lui-même l’écriteau comme tu l’as si bien remarqué, ce qui est lourd de conséquence.

Il manifeste en lui, par ce geste et sa détermination verbale vis-à-vis des prêtres, des prémices de la confession de foi comparables à des balbutiements.

Il y a donc Pilate, qui par l’écriteau a annoncé indirectement la confession de foi du coeur et le centurion, qui lui a confessé la foi par la bouche. Ces deux romains nous aident aujourd’hui, en regardant la Croix de Jésus-Christ, à croire qu’il est bien le Fils de Dieu, le Sauveur. C'est à dire Celui qui nous ouvre le passage de la mort à la vie !

Merci pour ta passion et tes questions pertinentes !

Bonne Pâques et à une autre fois pour une nouvelle série !

Ton ami !