« Fais paraître ton jour », Didier RIMAUD et Jacques BERTHIER
- bohleremmanuel
- 15 déc. 2020
- 3 min de lecture
Libre commentaire de l’hymne « Fais paraître ton jour«
Cote: YH 53
Texte de Didier RIMAUD (1922-2003).
Musique de Jacques BERTHIER (1923-1994).
Article publié par l’Union Sainte Cécile, dans la revue CAECILIA du Service Diocésain de Pastorale Liturgique et Sacramentelle, de musique et d’art sacré de l’archidiocèse de Strasbourg.
N°04, édition de 2020.

« Christ de saint Jean de la Croix » (1951)
Ce grand classique du chant liturgique cache 2 trésors : l’un textuel, l’autre musical.
Leur rencontre cristallise un diamant dont les reflets n’altèrent en rien une solide théologie pascale puisée dans le mystère de la Croix.
Pour le trésor textuel, le jésuite Didier Rimaud nous a tissé une tapisserie biblique d’une rare ampleur.
7 strophes et un refrain s’apparentent à une litanie en l’honneur de la Croix pour reprendre la tradition spirituelle des passionistes (fondée en 1720 par Paul de la Croix).
Chaque strophe est composée d’un tercet commençant par une invocation.
Les 1er et 3ème versets du tercet invoquent la Croix. Ils font références à l’Ecriture (Ancien et Nouveau Testament) qui annoncent et donnent sens à la mort de Jésus.
Quant au 2ème verset du tercet, il invoque « par le corps de Jésus-Christ ». Cela désigne pour les strophes 1 à 4 les membres souffrants de l’Eglise d’aujourd’hui.
Cette structuration actualise ce verset de saint Paul : « J’achève, dans ma chair, ce qui manque aux souffrances du Christ pour son corps qui est l’Église. » (Col 1,24).
Pour les strophes 5 et 6 il y a un changement car on désigne le corps glorieux de Jésus ressuscité.
D’autant que le mot « alléluia » fait son entrée pour conduire à la 7ème strophe où il n’y a plus que lui.
Les strophes forment 2 groupes bien distincts.
Leur progression fait que l’on passe des souffrances du Crucifié à la joie pascale du Ressuscité, de l’ancienne à la nouvelle Alliance.
Voici les références :
Strophe 1 : Is 49, 3-8 et Jr 1, 11-12 - 2,8
Strophe 2 : Is 66, 12 et Ez 36, 6-11 – 24-36
Strophe 3 : 2 Sm 11, 8-15 et Jr 50, 4-12
Strophe 4 : Ez 31, 1-14 et Is 9, 1-6
Strophe 5 : Jn 10, 1-21 ; 1 P 3, 15-22 ; Ep 5, 8-14 et He 9, 7-15
Strophe 6 : Col 1, 15-20 ; Ga 3, 13-14 ; 1 Co 15, 35-57 et Mt 27, 52
Ces triples invocations vont conduire au refrain où l’on demande la manifestation du Jour de Dieu et de sa Grâce en référence à Jl 3, 1-5.
Le mémorial de la Croix devient le lieu d’une source jaillissante : le Salut et la joie pascale.
L’ensemble strophe-refrain s’inspire fidèlement de la prédication apostolique : celle de saint Pierre le jour de la Pentecôte (Ac 2, 14-41) et celle de saint Paul (1 Co 1, 18-23).
Il permet d’entrer dans l’intelligence de l’Ecriture et de vivre cette antienne : « Nous adorons ta Croix au Christ, et nous chantons et glorifions ta sainte Résurrection. Voici que par ce bois, la joie est venue dans le monde[1] »
Trésor musical qu’est la musique de Jacques Berthier.
Hésitante entre mi mineur et sol majeur, elle participe à cette éclosion, ce jaillissement.
Pour les strophes, dans un esprit minimaliste aux accents contrapuntiques, 3 mélodies suivent les invocations et se superposent progressivement, donnant l’impression d’une exposition de fugue. Selon le principe de la musique spectrale l’harmonie se déploie, s’amplifie et se replie sur l’unisson du Si à l’octave à chaque fin d’invocation.
Le refrain est un choral majestueux. On retrouve l’unisson du Si à l’octave qui fera éclore l’ample harmonisation à 4 voix.
_______________________________________________________________
[1] Antienne de l’Office de la Passion, le Vendredi Saint. Abrégé d’un tropaire que l’on chantait à Jérusalem au XIème siècle.
Comments