Mieux vaut-il être du côté des Pharisiens que dans le parti des traîtres ? Essai complémentaire
- bohleremmanuel
- 15 déc. 2020
- 24 min de lecture
Les contingences de publications font que le Commentaire d’évangile (Mt 22, 15-21) pour le 29ème Dimanche du Temps Ordinaire (année liturgique A), célébrée cette année le dimanche 18 octobre 2020 et publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO (édition du 16 octobre 2020) est trop bref par rapport aux questions qu'il soulève.
C'est pourquoi, voici un essai complémentaire pour d'une part tenter d'élaborer une synthèse sur la complexe question des Pharisiens afin de mettre en lumière leurs caractéristiques fondamentales. D'autre part pour remettre en perspective le commentaire d'évangile à la lumière de cette synthèse.

« Le tribut de César » (1620), par Jean-Valentin de BOULOGNE (1591-1632)
Comment interpréter la célèbre maxime christique "rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu" en évitant rengaines et poncifs ? Une seule solution : se demander ce qu'est un "pharisien", tout autant que leur "perversité" !
* *
*
Pourquoi est-il primordial de donner ce double coup de projecteur ?
Tout d'abord parce que les Pharisiens sont ceux qui provoquent la mise en scène de cette compromettante rencontre, mais aussi une réponse circonstanciée de Jésus.
Ensuite la perversité est précisément le terme employé dans la narration pour qualifier l'attitude indirecte des pharisiens.
D'un point de vue sémantique, le mot "pharisien" provient du mot grec "pharisaioi". Il s'agit d'une traduction d'un mot à la fois d'origine araméenne et hébraïque, désignant "séparer" et "expliquer". Cette analyse sémantique[1] a souvent permis de les déterminer comme un groupe "séparé", "séparatiste" au sein Judaïsme, "hérétique" jusqu'à devenir "sectaire". Il faut bien admettre que certaines tournures de style des Evangiles appuient cette conception, surtout au sein de l'évangile selon saint Matthieu. Mais en même temps, ils sont ceux qui "expliquent" l'Ecriture, c’est-à-dire qu'ils "recherchent", "commentent" et "scrutent" l'Ecriture.
Cette conception résolument très négative est encore très répandue laisse à penser que les Pharisiens forment un groupe organisé et très influent, responsable en parti de la conspiration et de la mort de Jésus, mais en est-il vraiment ainsi ? Les études exégétiques les plus récentes[2] et les dernières découvertes[3] ont montré que la réalité sur le groupe dénommé "Pharisien" est beaucoup plus complexe, rendant complètement insuffisante l'analyse uniquement sémantique pour comprendre l'histoire du groupe.
Il y eut un évènement lorsque le père John-Paul Meier (1942- ) de l'archidiocèse de New-York publia une somme exégétique en 5 volumes entre 1991 et 2006 s'intitulant : A Marginal Jew : Rethinking the Historical Jesus. La traduction en français de cette somme entre 2004 et 2018 sous-titrée "Un certain juif, Jésus" fut accompagnée de recensions[4], de présentation méthodologique[5] et d'études critiques[6] tant l'impact fut considérable. En effet, l'historien québécois Paul-Hubert Poirier écrira en faisant une recension de cette somme exégétique :
Nous disposons là de l’exposé le plus complet et le plus détaillé qui soit du « Jésus historique », c’est-à-dire de tout (et de cela seulement) ce que l’on peut dire du Nazaréen sur la base d’un examen des sources mené selon les règles de la méthode historique généralement admises, indépendamment de toute conviction de foi (ou de non-foi)[7].
C'est au sein de son 3ème volume que John-Paul Meier traite des relations qu'entretinrent aves ses "concurrents" juifs[8]. Qu'ils s'agissent des Sadducéens, des Esséniens, l'exégète américain traite de la question des Pharisiens. Il y montre comment Jésus a été en contact avec eux et comment on peut cerner le conflit qui les oppose. S'il semble acquis qu'il y a un avant et après John-Paul Meier en ce qui concerne les recherches historico-critique concernant Jésus[9], ses recherches concernant les Pharisiens viennent remettre en question bien des idées que l'on croyaient acquises et qui donnaient l'occasion à bien des prédicateurs parmi les plus militants, au sein de la dramaturgie de la Passion d'élaborer de belles formules de styles pour les considérer comme les responsables et les acteurs de la mort de Jésus et surtout incarnant l'opposé de la figure idéal du chrétien selon l'Evangile. Or John-Paul Meier démontre bien que l’écueil qui peut menacer le chercheur, tant le prédicateur, est la confusion entre la théologie morale et l’éthique chrétienne d’une part et l’enseignement de Jésus sur la Loi juive dans ses controverses avec les Pharisiens d’autre part[10]. Malheureusement cette confusion est bien présente (trop peut-être), jusqu'à devenir une sorte de leitmotiv récurrent chez certains !
Appuyer sur ces recherches, tentons de cerner l'évolution et les caractéristiques de ce courant.
* *
*
Les Pharisiens qui sont-ils ?
Préfigurateurs du rabbinisme[11] en tant qu'initiateurs de la Torah (ou Loi) orale[12], les Pharisiens apparaissent vers 165 avant J-C au moment de la révolte des Maccabés menée par le vieux prêtre Mattathias. A ce moment-là, le roi Antiochos IV de la dynastie des Séleucides qui nomme le Grand-prêtre[13], souhaite imposer la culture grecque au judaïsme[14] à tel point qu'en 168 avant JC il décide d'abolir la Torah et d'interdire le culte dans le Temple en y introduisant un culte à Zeus[15]. Cette révolte, raconté dans les deux premiers Livres des Maccabés, permet de restaurer le culte, rendre l'autonomie à la Judée. Le prêtre Mattathias est alors considérée comme père-fondateur de la dynastie Hasmonéenne[16].
Cependant il fait partie de ce que l'on nomme les "prêtres-lévites", c’est-à-dire des prêtres qui officient au sein de petits villages ruraux. Cette catégorie est considérée comme dissidente puisqu'au sein de la Tribu de Lévi il y a distinction entre "prêtres" qui occupent les fonctions sacerdotales et "lévites[17]" qui bien qu'étant liée au culte (chant-musique-enseignement, garant de l'application de Loi) n'offrent pas de sacrifice. Ainsi être "prêtre-lévite" constitue un culte idolâtrique pour les prêtres du Temple de Jérusalem. La conséquence de la révolte Maccabéenne avec la mise en place progressive de la dynastie Hasmonéenne fera que ce sont maintenant des prêtres-lévites qui associent le pouvoir politique et le pouvoir religieux, surtout avec la figure du Grand-Prêtre ! Il va y avoir alors une forte opposition forte d'un autre groupe (les Sadducéens[18]) composé de divers groupes de prêtres qui, tout en se revendiquant être les successeurs de Tsadoq, c’est-à-dire le Grand-prêtre du Temple de Salomon choisi par le Roi David en personne (1 Chr 5 et 6), ne reconnaissent pas leur légitimité à devenir "Grand-Prêtre".
Bien qu'étant opposé au groupe des Sadducéens, ce problème de légitimité sacerdotale ne plaira pas au groupe des Pharisiens. D'autant que s'ils sont proches de ce mouvement Maccabéen qui consistait à cette restauration d'une authenticité du judaïsme face au mouvement d'hellénisation[19], dès 134 av JC, l'hasmonéen Jean Hyrcan Ier à la fois roi et Grand-Prêtre, se compromet en utilisant des mercenaires grecques à des fins uniquement politiques[20]. Les Pharisiens s'opposent davantage, et de manière virulente, à cette déviance du pouvoir temporel face au pouvoir spirituel ! A leurs yeux, la dynastie hasmonéenne semble se détacher de l'idéal de la révolte Maccabéenne et surtout ne conservent pas les promesses faites au prêtre Matthatias de respecter scrupuleusement les prescriptions de la Loi.
Les Pharisiens revendiquent une "Torah orale" remontant à Moïse, transmise de génération en génération, de Maîtres à élèves uniquement sous le principe de l'oralité, sans passer par l'écrit.
Reconnus comme très pieux, fervents et ascètes pour préserver la pureté de la Loi de Moïse, pratiquant le jeûne, appliquant à leur vie quotidienne des règles de comportement et de pureté désignées par le terme Halakha[21]. Il s'agit de l'enseignement oral de la Loi qui passe par des "Docteurs" pour en déterminer les aspects pratiques.
Les Pharisiens sont avant tout des chercheurs de sens, c’est-à-dire que l'interprétation de la Loi aura une place centrale afin d'en garantir une orthodoxie. Sur cette question, le travail de John-Paul Meier montre combien les notions de "Loi de Moïse" et "d'orthodoxie" sont des cibles "mobiles" pour des investigations de chercheurs[22], ce qui les rend difficilement cernables. Par conséquent, même si nous savons qu'ils interprètent la Loi dans un esprit orthodoxe, les conclusions concernant les notions de "Loi" et "d'orthodoxie" ne peuvent être qu'extrêmement nuancées. L'exégète ira jusqu'à écrire que traiter et analyser la question du "Jésus historique" parait bien facile à côté de la question de la "Loi historique"[23] et surtout de la question des "Pharisiens historiques"[24] !
Les Pharisiens observent en outre les livres religieux contenant entre autres des rituels pour les cérémonies désignés par le terme "Haggadah"[25]. Ce type de littérature populaire est l'héritage de l'époque et de la parole prophétique désignant la prédication des orateurs populaires, la conférence devant la foule, l'exposition libre et familière de pensées et de sentiments accessibles aux masses. C'est comme cela que les Pharisiens vont acquérir progressivement une très grande popularité. Ils encadraient par exemple la vie des gens par le moyen des synagogues répandues dans toutes les villes et les villages
En outre au sein du mouvement Maccabéen de restauration du culte pour le seconde Temple, des études émettent l'hypothèse que certains Pharisiens vont jusqu'à peut-être étendre des rites et des coutumes requises pour les prêtres du Temple[26]. Ce qui constitue le problème essentiel avec les Sadducéens. Cette hypothèse peut se comprendre à priori dans une attitude de défense et de préservation de l'intégrité. En effet, face aux mouvements politiques qui imposent la culture et la domination grecques (puis plus tard celles des Romains), si le Temple et les Prêtres viennent à être plus au moins "corrompus" ou "complices" avec l'autorité, c'est un moyen de préserver une forme d'intégrité de la mémoire.
Par l'utilisation de l'Haggadah et la littérature populaire issu de prophétisme mais également par l'utilisation de la Halakha, les Pharisiens se présentent comme un groupe de laïcs "sacerdotalisant" : où l'union singulière entre règles (lois) éthiques et pratique cultuelle les distingue fondamentalement et radicalement des autres, que ce soient des Sadducéens et des Esséniens qui apparaissent à la même époque.
La question du refus de cette inculturation forcée[27] fera progressivement des Pharisiens des figures d'opposition. Ils formeront ce que l'on nommera plus tard une "école de pensée" (ou "école philosophique") avec les Sadducéens et les Esséniens. Face à cette inculturation helléniste forcée par les propres autorités du Judaïsme, on peut comprendre leur réaction et leur positionnement : ils veulent préserver une "intégrité" de leur héritage culturel et spirituel afin de ne pas trahir, ni corrompre la Loi de Moïse. Leur idéal hautement spirituel et religieux va s'associer progressivement à une démarche "politique" ce qui fait que dès le départ les Pharisiens semblent adopter un positionnement que l'on pourrait qualifier de "paradoxal".
Ainsi à force d'opposition, ils accèdent au pouvoir entre 76-67 avant J-C[28].
Malheureusement le pouvoir ne semble pas leur avoir été bénéfique tant ils pratiquent une répression[29] face à leurs ennemis. La répression et leur rigorisme sont tels que même la Reine Salomé est contrainte de rechercher asile[30] !
Face à cela, et bien qu'étant parfaitement cohérent avec leur opposition à l'hellénisation du Judaïsme, on peut comprendre d'une part une certaine méfiance grandissante à leur égard. D'autre part, une tendance forte de leur part à un intégrisme presque sectaire qui a conduit à une forme d'intolérance répressive. Peut-être est-ce cet épisode qui va stigmatiser l'image de rigorisme et d'intransigeance ?
Toujours est-il que depuis l'invasion romaine par le général Pompée en 63 avant J.C. ils sont systématiquement écartés du pouvoir politique. On peut comprendre ce positionnement de l'autorité romaine, car s'ils sont opposés à l'hellénisation du Judaïsme, ils seront opposés à l'inculturation romaine. Cependant, ils sont devenus un groupe organisé et influent à tel point qu'Hérode le Grand se servira d'eux uniquement pour renverser la dynastie hasmonéenne à laquelle ils se sont opposés face à sa déviance. Cette dernière étant pro-grec, elle devenue un obstacle à la domination romaine.
Une fois en place en 37 avant J-C, Hérode le Grand va complètement dissoudre le groupe des Pharisiens jusqu'à les interdire officiellement. Pour mieux placer le pays sous la tutelle romaine, il ne souhaite plus aucune opposition politique organisée[31] et les Pharisiens représentent alors un danger potentiel. D'un groupe fort et institué, les Pharisiens sont alors réduits au plus à de petites associations privées de personnes.
A partir de 4 avant J-C le même mouvement continu avec Hérode Antipas qui maintient également l'ordre par répression et réduit quasiment à néant leur influence[32]. Même s'il y a une paix civile en apparence, cette dernière est bien fragile car les tensions existent.
En tous cas la dissolution des Pharisiens en tant que groupe organisé et leur interdiction d'agir "officiellement" en public, est peut-être à l'origine du fait que l'on ne trouve quasiment plus leurs traces dans les sources historiques. D'ailleurs, force est de reconnaître que le seul pharisien vivant avant 70 dont les écrits nous sont parvenus est Saül de Tarse (autrement dit saint Paul)[33] !
* *
*
Les Pharisiens au temps de Jésus
Au moment du ministère public de Jésus, même s'ils possèdent encore une aura très populaire au sein des juifs, ils ne sont plus un groupe politique solidement organisé et encore moins influent[34]. Seules quelques personnes complètement isolées arrivent à être dans les arcanes des prêtres ou du pouvoir politique. D'autres tentent d'organiser de faibles révoltes volontairement contre l'autorité romaine[35]. On ne peut alors que reconsidérer à nouveau frais le sens de leur action envers Jésus.
S'ils ne sont pas ennemis "institutionnels" de Jésus et qu'ils ne peuvent plus peser dans la balance du pouvoir, les Pharisiens peuvent alors être considérés comme un mouvement "caché" qui semble défendre et souhaite absolument préserver ses racines et son identité culturelle face aux mouvements de dominations issues d'un colonialisme. S'ils refusaient jadis la domination imposée de la culture grecque, à plus forte raison ils refusent la domination romaine. S'ils sont "séparatistes" c'est plus pour conserver, par le biais essentiel de l'interprétation de l'Ecriture, une forme d'intégrité et d'orthodoxie de Judaïsme face à la culture grecque puis romaine.
Ils sont opposés à Hérode Antipas, lié au pouvoir romain puisqu'il va faire construire la ville de Tibériade en l'honneur de l'Empereur Tibère.
Mais aussi, dans une certaine mesure, ils sont opposés à une certaine conception de la figure du Grand-Prêtre du Temple qui sous la tutelle du Préfet, est nommé par les autorités romaines pour collecter l'impôt pour César et organiser l'administration romaine en province de Judée[36]. Ce dernier est aidé par les Sadducéens. Puisque les Pharisiens sont un groupe "sacerdotalisant", leur amour pour le Temple doit leur causer bien du tourment lorsqu'ils constatent une telle compromission. Cela est peut-être à leurs yeux, une "impureté" !
D'ailleurs lorsque le Temple sera détruit par l'invasion romaine de Jérusalem en 70, ils seront à nouveau sur le devant de la scène pour tenter une autre "restauration", mais en vain. Cependant, ils seront à l'origine du mouvement que l'on nomme "judaïsme rabbinique", qui structuré entre le IIème et le IVème siècle de l'ère chrétienne. Il deviendra l'une des premières normes de ce que l'on nomme aujourd'hui "judaïsme" et qui regroupe plusieurs courants.
La seconde destruction du Temple en 70 causera un tel traumatisme dans les consciences qu'elle va susciter un mouvement de "mise par écrit" de cette vénérable Tradition orale afin de ne pas la perdre dans les abîmes du temps. Cette mise par écrit est le signe d'une complexification de transmission orale au sein d'un contexte de violentes persécutions et dans un contexte de diasporas progressives. C'est pourquoi il ne faut pas oublier la Mishna[37], ce premier recueil de la "Loi juive" issu du judaïsme rabbinique et qui se veut précisément le pendant oral de la Torah[38], c’est-à-dire une compilation de réflexions pratiques afin de pouvoir accomplir la Torah en parfaite intégrité. La Mishna sera une mise par écrit de l'Halakha. Elle sera ensuite commentée au sein d'un autre écrit : la Guemara[39]. Puis s'en suivra la rédaction du Talmud[40] qui compilera ces 2 sources. Par leur élaboration narrative, la Mishna puis le Talmud sont une expression, à bien des aspects, de la réflexion et de la "pratique" des Pharisiens quant à l'interprétation de la Loi pour pouvoir l'appliquer avec orthodoxie.
S'ils n'ont plus aucune influence politique, peut-être ont-ils encore une influence spirituelle et religieuse ? Il semble de plus en plus probant qu'au temps de Jésus et malgré leur aura populaire, les Pharisiens sont trop "marginalisés" et n'ont que trop peu d'influence pour infléchir quoi que ce soit au niveau religieux[41].
Ces découvertes historiques viennent alors contrebalancer l'idée généralement acquise que les Pharisiens étaient des gens influents, qui de connivence avec Hérode Antipas, ont tout fait pour vouloir arrêter Jésus et le faire périr.
Or, même dans le cadre d'une prédication on ne peut plus considérer les Pharisiens pour ce qu'ils ne sont plus! Réduit à une forme de silence au sein du pouvoir politique et en plus muselés par Hérode Antipas, ils n'en demeurent pas moins une forme de "nostalgie politique" dans leur manière d'être : des "nostalgiques" d'un âge d'or du Judaïsme ?
* *
*
Jésus, un pharisien marginal ?
Selon les analyses de John-Paul Meier, le "Jésus historique" est le "Jésus halakhique" ! C’est-à-dire le Jésus historique s’intéresse à la "Loi mosaïque", en discute (l'interprète) et se préoccupe des questions pratiques qui en découlent (à la fois religieuses, cultuelles et morales)[42].
D'ailleurs, en raison de l’importance que John-Paul Meier lui donne sur le « Jésus halakhique », il convenait de mieux cerner le sens technique du substantif halakah. En continuité avec l’emploi métaphorique du verbe « marcher », halak en hébreu est utilisé pour désigner le comportement moral (tradition Deutéronomique). A partir de la Mishna[43], il désignera une prescription ponctuelle, une règle juridique qui définit ce qu’il faut faire pour marcher de manière conforme à la Loi (c’est-à-dire la volonté) de Dieu. Enfin il désigne l’ensemble de ces règles de vie dans les sphères du culte, des aliments, de la pureté rituelle, des fêtes, du droit civil et du droit pénal[44].
Ainsi, la distinction entre préceptes-comportements éthiques d’une part, et règles-pratiques cultuelles d'autre part est sans doute significative pour nous, mais elle ne l’était pas pour le temps de Jésus. Par conséquent, s'il est fait que l'on peut considérer comme acquis : le Jésus historique (ou "Jésus halakhique") ne semble absolument pas dissocier pratique cultuelle et comportement éthique ! Bien au contraire, l'un ne va pas sans l'autre et tout porte à croire qu'il y a une unité constante et constitutive de l'originalité de son enseignement et de son action tant cultuelle qu'éthique !
* *
*
Si Jésus appartient au mouvement pharisien, quelles conséquences théologiques pour l'interprétation des Evangiles ?
Déjà on ne peut plus comprendre la vie et l'enseignement de Jésus sans l'enraciner dans ce qui constitue l'essence même du mouvement pharisien : l'interprétation de l'Ecriture comme lieu source d'enracinement d'un attachement au culte et au Temple ET d'un attachement à une règle de conduite pratique.
Jésus fait donc parti de ce mouvement de laïcs, où la figure du Prêtre et le culte du Temple selon l'Ecriture (et il faut bien insister sur cet aspect), sont constitutifs grâce à la dynamique d'interprétation. Si l'interprétation de l'Evangile conduit à une désolidarisation avec la dimension cultuelle, voir à considérer cette dernière comme une forme "d'obstacle" au profit d'une survalorisation exclusive de la dimension éthique : notre interprétation est erronée. Si l'interprétation de l'Evangile conduit à une désolidarisation avec la dimension éthique au profit d'une exclusivité cultuelle : notre interprétation est erronée.
Si nous voulons être fidèle à l'Evangile, il nous faut absolument tenir cette "union" et cet équilibre entre culte et éthique.
Finalement, cette question exégétique nous amène à une question théologique qui n'est sans pas évoquer les querelles christologiques des premiers siècles. L'histoire de la christologie de l'Antiquité jusqu'au Concile de Chalcédoine en 451 nous amène à considérer que la juste compréhension de "l'union" entre la nature divine et la nature humaine de Jésus a été capitale pour ne pas basculer dans les diverses hérésies. Il a fallu des efforts de clarification terminologique pour ne pas considérer cette "union" comme une "séparation" ou bien une "confusion". Par analogie, il en est de même pour notre question de "l'union" dynamique entre le culte et l'éthique. Il faut le comprendre avec justesse, à mon avis sans "séparation" ni "confusion" ! Cela soulève une fondement méthodologique incontournable relative à la vie chrétienne : peut-on interpréter l'Ecriture sans une christologie ?
Ensuite les controverses avec les Pharisiens sont plus à considérer comme des querelles d'interprétation interne permettant à Jésus de se singulariser, sans pour autant renoncer à ce qui constitue l'originalité de la culture pharisienne : l'amour de l'Ecriture et son interprétation fidèle par la pratique.
Même si les expressions sont fortes envers les Pharisiens, ces dernières s'adressent à des personnes qui n'ont plus aucunes influences politiques comme religieuses déterminantes.
Comme les Pharisiens n'ont plus aucunes influences, ils ne peuvent plus être considérés comme ceux qui ont orchestré la mort de Jésus en complicité avec Caïphe et Hérode. D'ailleurs il ne faut pas oublier que même si l'on parle d'eux avec dureté dans les Evangiles, ils ne sont absolument pas présents au sein des récits de la Passion.
C'est pourquoi il serait dangereux de trop les survaloriser dans les homélies et surtout de les prendre pour ce qu'ils ne sont plus à cette époque ! A en parler systématiquement de manière quasi obsessionnelle pour justifier une purification (par moment une épuration) dans la vie ecclésiale serait hélas très tendancieux, et peut-être même anti évangélique, au sens narratif du terme !
Lorsque la caricature des pharisiens devient le fonds de commerce des réformateurs de l'Eglise, sont-ils encore au service de l'intelligence de l'Ecriture ?
* *
*
Essai d'interprétation en fonction de ces découvertes …
Replacé dans ce contexte, quel est finalement le problème de l'évangile ? En quoi les pharisiens ont-ils témoigné de perversité ?
Pour cela scrutons l'évangile qui aura ce génie de mettre en lumière le machiavélisme de certains pour mieux découvrir comment la Grâce change les cœurs.
Déjà les Pharisiens ne se mettent pas en première ligne.
Ce qui confirme les découvertes précédentes : nous sommes bien face à un groupe qui est sous le coup d'une "sanction" de la part du pouvoir politique régnant. Il ne doit plus se rassembler de manière "officielle" et n'est donc plus un groupe constitué qui peut se permettre d'agir en public. Les Pharisiens sont donc obligés d'agir indirectement en secret comme le feraient des "résistants" ou bien des "terroristes"…
Ensuite l'Evangile nous dit qu'ils envoient leurs disciples et surtout des témoins d'Hérode pour parler, dans le Temple, de la question de l'impôt.
Au sein de cette mise en situation narrative va se jouer la perversité des Pharisiens où ils vont manipuler Jésus lui-même à des fins bien peu recommandables. Pourquoi ? Indirectement ils provoquent une rencontre qui va mettre en lumière leur différents : déjà avec Hérode Antipas qui fait subir une répression à toutes contestations. Et puis le Grand-prêtre Caïphe chargé de l'impôt romain, nommé et maintenu en poste pendant 20 ans grâce à l'influence de Ponce-Pilate Il représente pour eux le travestissement et la compromission de la Loi et surtout du Temple.
Comment vont-ils opérer ?
Tout d'abord les disciples des Pharisiens commencent leur discussion par attribuer à Jésus ce qui constitue l'identité, la définition de l'idéal du mouvement pharisien : un authentique retour aux sources. Cette attribution est légitime tant Jésus est quelqu'un de "vrai", qui n'est pas sous l'influence d'une "domination extérieure" mais est complètement "libre", qui "enseigne en vérité" sans chercher à travestir l'intégrité de la Loi et des Prophètes, et qui "sonde les cœurs et les reins". Nous avons ici une preuve narrative de la proximité de Jésus avec le milieu pharisien dont il appartient. Fondamentalement les Pharisiens ne sont pas complètement ironiques en disant cela. En appliquant à Jésus l'idéal qui les constitue, ils ne font que confirmer cette donnée historique essentiel de l'exégèse : le "Jésus historique" est un "Jésus halakhique", appartenant au mouvement Pharisien. N'en déplaise à ceux qui ont élaboré des théories séparatistes entre les Pharisiens et Jésus comme s'ils étaient antinomiques : même si Jésus a un avis divergent, il n'empêche qu'il appartient à ce mouvement. Peut-être les Pharisiens lui reprochent-ils d'être finalement "plus Pharisien" qu'eux ! Sont-ils, consciemment ou non, jaloux de lui tant il incarne leur idéal par rapport à l'interprétation fidèle de Loi, tout en l'associant à une vie cultuelle et fraternelle cohérente ?
Puis la manipulation va s'opérer par la flatterie pour le prendre à parti dans leurs querelles politiques et le transformer à son issu en petite bombe à scandale face à leurs ennemis institutionnels ! Jésus serait-il en proie d'être le bouc émissaire indirect des Pharisiens ? Jésus semble déjà abandonné et rejeté par un milieu auquel il appartient… Comment ne pas penser à ce verset du Prologue de l'Evangile de Jean : « Il est venu chez les siens et les siens ne l'ont pas reconnu ».
Ensuite vient la clef de voûte, la question qui permettra aux Pharisiens de mettre Jésus en porte à faux : faut-il payer l'impôt ou pas ? La manipulation des Pharisiens réside dans cette question : là voilà cette bombe à retardement car elle place Jésus au cœur d'une controverse qui ne relève pas de lui, mais qui est le combat des Pharisiens depuis l'arrivée au pouvoir d'Hérode le Grand. En effet, depuis qu'ils ont été écarté du pouvoir et même de la vie publique ; n'ayant plus aucune influence signifiante, nous avons pu découvrir que les Pharisiens avaient comme une sorte de rancœur face à ce qui à leurs yeux était la trahison suprême ! La pureté du Judaïsme avait connu des difficultés avec l'imposition de la culture grecque, maintenant elle est livrée à la culture romaine par celui-là même qui est devenu Roi grâce à eux, en s'opposant à l'hellénisation de Judaïsme antique !
Malheureusement les Pharisiens tombent dans leur paradoxe car il est plus question de politique que de spirituel dans cette controverse ! Leur perversion aura été sans doute de manipuler Jésus pour vouloir en faire un révolutionnaire au sens politique du terme contre l'Etat Romain !
Et si les Pharisiens étaient en train de trahir Jésus, en se servant de lui contre Hérode Antipas ? L'Evangile ne serait-il pas en train de suggérer que les Pharisiens agissent envers Jésus comme jadis Hérode le Grand avait agi envers eux ? Ils semblent trahir Jésus comme jadis ils ont été trahis !
Sa popularité et son enseignement ne sont peut-être qu'un prétexte pour provoquer une trouble contre l'autorité en place, à savoir la compromission du Roi et du Grand-Prêtre Caïphe avec les autorités romaines. Contrairement aux idées reçues, et comme l'a montré les apports de l'exégèse récente, les Pharisiens semblent souhaiter mettre à mal Jésus, non pas en complicité avec Hérode, mais contre Hérode ! Ils feraient ainsi d'une pierre deux coups : On compromet l'un des siens en confondant son véritable ennemi ; l'Empereur à travers Hérode et Caïphe ! La voilà leur perversion : comme un pion, ils se servent de Jésus uniquement pour provoquer un trouble face à la compromission du Roi qui mène une politique répressive ! En effet, si Jésus avait été ouvertement contre l'impôt, il serait devenu un agitateur dont les partisans d'Hérode auraient tôt fait de le réprimer pour avoir troublé l'ordre public. S'il avait été contre l'impôt, il serait officiellement contre l'autorité religieuse du Temple et de Caïphe.
Il est possible de dire que leur perversion serait alors de vouloir faire de Jésus, contre son gré, un révolutionnaire provoquant un trouble dans l'ordre public ! Le voilà le vrai danger et ce danger est encore bien réel face à nos urgences en tous genres ! Mais Jésus qui "scrute les cœurs et les reins" se détourne de la voie de la révolution et de l'agitation publique. Il restera intègre !
Par sa réponse, Jésus ne sera pas un révolutionnaire !
Il faut tout de même admettre que sa sentence avait de quoi plaire aux Pharisiens, car en rendant à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu, il critique indirectement la compromission du Grand-Prêtre et du Temple devenu une perception où se mêlent temporel et spirituel !
Un peu comme si ce dernier avait oublié sa vocation première au détriment d'une respectabilité envers l'autorité romaine. D'autant que la monnaie servant à payer l'impôt était frappé directement par le Temple sur ordre du Grand-Prêtre ! Heureusement que nous sommes maintenant préservés de ces "grands-prêtres de préfecture" qui préfèrent davantage faire bonne figure face aux représentant des Etats que de prendre soin concrètement de leurs troupeaux et de leurs âmes. Il y a des moments où il vaut mieux être du côté des Pharisiens…
Par sa réponse très subtile, Jésus confirme ce qui est dit de lui au début de la discussion. En opérant une "séparation" entre César et Dieu et sous-entendant le problème que rencontre l'autorité religieuse (une compromission servant davantage les intérêts politiques que les intérêts spirituels) cette séparation enracine indirectement Jésus dans cet aspect déterminant et capital concernant la culture pharisienne : la volonté de préserver dans son intégrité la Loi de Moïse sans compromission.
Mais en même temps, tout en étant sur la même longueur d'onde que les Pharisiens sur ce point-là, Jésus leur rappelle indirectement que si leur fin est bonne, leurs moyens ne sont aucunement justifiés. En répondant "rendez à César ce qui est à César", Jésus ne se met pas en porte-à-faux vis-à-vis des disciples d'Hérode, qui en période de répression, auraient tout de suite signalé une tentative de rébellion vis-à-vis de l'impôt de l'Empire. Mais en ajoutant "rendez à Dieu ce qui est à Dieu" Jésus confirma sa volonté de rester intègre envers la Loi mais il ne succombe pas à la tentation et la manipulation des Pharisiens.
Pour le coup, dans ce passage il n'entre pas en conflit ouvert puisque le ton de sa réponse n'est en aucune manière une provocation outrancière. Mais peut-être que l'on peut considérer cet ajout comme étant un rappel envers les Pharisiens.
Un rappel de ce qui constitue leur identité : leur profonde aspiration religieuse ne peut à aucun moment se muter en une investigation uniquement politique. On ne peut avoir de profondes aspirations spirituelles et les enfermer dans un programme de politique ou de militantisme, sinon c'est indirectement le triomphe d'un matérialisme.
Par leur "mise en scène" de ce passage, il faut bien admettre que les Pharisiens ont succombé à ce déséquilibre car leur désir de préservation de l'intégrité de la Loi de Moïse s'est transformé en un combat exclusivement politique, même s'ils ont été victime de trahison et d'une injuste répression de la part d'Hérode le Grand et d'Hérode Antipas.
Si nous voulons rendre à Dieu ce qui est à Dieu, il nous faudra d'abord être les témoins d'un Au-delà auquel nous aspirons ! Nous ne pouvons aspirer à l'honnêteté du cœur sans être honnête par ses actes !
_______________________________________________________________
[1]Lester L. Grabbe, Judaic Religion in the Second Temple Period : Belief and Practice from the Exile to Yavneh, Routledge, 2000, p. 185-199. [2] Enrico Norelli, « Jésus en relation », in : Andreas Dettwiler, Jésus de Nazareth : Études contemporaines, Genève, Labor et Fides, 2017, p. 118. [3]John Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.578. [4] Christophe Théobald, "Un certain juif, Jésus", Recherches de sciences religieuses Tome 96, Paris, Centre Sèvres, 2008, p. 173-200. [5] Jean-Louis Souletie, "Vérité et méthodes. La question christologique du Jésus historique après John Paul Meier", Recherche de sciences religieuses Tome 97, Paris, Centre Sèvres, 2009, p.375-396. [6] Simon Claude Mimouni, "Jésus et l'histoire, à propres des travaux de John Paul Meier",Recherche de sciences religieuses Tome 99, Paris, Centre Sèvres, 2011, p.529-550. [7]Paul-Hubert Poirier, Recension du livre John P. MEIER, un certain juif, Jésus, in : Littérature et histoire du christianisme ancien, "Revue Laval théologique et philosophique", Volume 65 n°01, 2009, p.121-167. [8] Michèle Morgen, recension du livre John Paul Meier, Un certain Juif Jésus. Les données de l'histoire. III. Attachements, affrontements, ruptures, traduit de l'anglais par Charles Ehlinger et Noël Lucas, Paris, Cerf, coll. Lectio Divina, 2005, Revue des sciences religieuses Tome 82, Paris, Centre Sèvres, 2008. [9]Jean-Pierre Steinberger, A propos du Jésus historique et de trois livres récents, Revue de sciences religieuses Tome 85, Paris, Centre Sèvres, 2010, p.553-559. [10] John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. IV : La Loi et l'amour, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2009, p.19. [11] Par rabbinisme on désigne la doctrine du judaïsme fondée sur la Loi écrite et la Loi orale, telle qu'elle a été formulée et transmise par les rabbins depuis la période du Second Temple (reconstruction du Temple après le retour d'exil à Babylone). [12] William Scott Green, What do we really know about the Pharisees and how do we know it ?, In Jacob Neusner et Bruce Chilton, In Quest of the Historical Pharisees, Baylor, University Press, 2007, p.411. [13] Elie Barnavi, Histoire universelle des Juifs, Paris, Hachette Littérature, 2002, p. 40. [14]John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.200. [15] Elie Barnavi, Histoire universelle des Juifs, Paris, Hachette Littérature, 2002, p. 44. [16] Enrico Norelli, « Jésus en relation », In: Andreas Dettwiler (éd.), Jésus de Nazareth : Études contemporaines, Genève, Labor et Fides, 2017, p.118. [17] Jonathan L. Friedmann, Music in Biblical Life: The Roles of Song in Ancient Israel, McFarland, USA, 2013, p. 124. [18] E. P. Sanders, Judaism. Practice and Belief., Trinity Press International, 1996. [19] Simon Claude Mimouni, Le Judaïsme ancien du VIe siècle avant notre ère au IIIe siècle de notre ère : Des prêtres aux rabbins, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », 2012, p.361. [20] Simon Claude Mimouni, Le Judaïsme ancien du VIe siècle avant notre ère au IIIe siècle de notre ère : Des prêtres aux rabbins, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », 2012, p.235. [21]Le terme est "halakha" désigne à l'origine cet enseignement oral de la "Loi juive", c’est-à-dire un regroupement de prescriptions, coutumes et traditions. La halakha est la règle de conduite pratique, le guide officiel de la vie religieuse et civile, elle est décrétée par l'autorité compétente (les docteurs) dans des formes déterminées, elle se veut obligatoire pour tout juif orthodoxe et a force de loi. Après 70 cet enseignement sera mis par écrit au sein de la Mishna puis constituera un des parties législatives du Talmud. [22]Jacques Schlosser, Le Jésus halakhique de John-Paul Meier, Revue de sciences religieuses Tome 97, Paris, Centre Sèvres, 2009, p.415-437. [23] John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. IV : La Loi et l'amour, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2009, p.20. [24]John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.429. [25]Cela désigne la "Haggadah". Il s'agit de l'exégèse d'un ou plusieurs versets bibliques dans un autre but que d'en tirer des lois comme la Halakha. Le plus célèbre est la Haggadah de Pessah'. Le texte élabore un commentaire sur les versets relatant la sortie d'Égypte, afin d'en souligner des messages qui n'y apparaissent pas à première lecture. Il s'agit d'un texte religieux ancien qui ritualise le repas du Seder lors de la Pâques juive. Ce corpus recouvre un ensemble hétéroclite de récits, mythes, homélies, anecdotes historiques, exhortations morales ou encore conseils pratiques dans différents domaines. C'est un type de littérature populaire juive ayant pour objet des enseignements non fixés par la Loi écrite ou orale. Cela constitue avec la halakha les deux grands aspects fondamentaux de l'enseignement rabbinique toujours appuyé sur l'Écriture, au moyen d'une dialectique de plus en plus complexe. Sur la question de la Haggadah on peut consulter: Judith Hauptman, "How old is the Haggadah ?", in : Judaism: A Quarterly Journal of Jewish Life and Thought, USA, Winter 2002. [26]Christopher Tuckett, Les Pharisiens avant 70, in : Daniel Marguerat, Le déchirement : Juifs et chrétiens au premier siècle, Paris, Labor et Fides, 1996, p. 81-86. [27]Simon Claude Mimouni, Le Judaïsme ancien du VIe siècle avant notre ère au IIIe siècle de notre ère : Des prêtres aux rabbins, Paris, PUF, coll. « Nouvelle Clio », 2012, p.232-234. [28] Christopher Tuckett, Les Pharisiens avant 70, In Daniel Marguerat, Le déchirement : Juifs et chrétiens au premier siècle, Paris, Labor et Fides, 1996, p. 87. [29]John Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.565. [30] Ibid. p.200. [31] Ibid. p.201,220,565. [32] John Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.202. [33]Jean-Pierre Steinberger, A propos du Jésus historique et de trois livres récents, Revue de sciences religieuses Tome 85, Paris, Centre Sèvres, 2010, p.553. [34]John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.201. [35] Ibid. p.221. [36] Ibid. p.202. [37] Le terme "Mishna" désigne le premier recueil écrit de la Loi orale juive classé par thème et non suivant l'agencement de versets bibliques. Composé entre le Ier siècle et 200 après Jésus-Christ, il s'agit du pendant oral de la Torah. Ce recueil est un fait une sorte de guide pratique afin de pouvoir accomplir en parfaite intégrité se qui est prescrit dans la Torah. Par exemple si la Torah prescrit qu'il faut réciter les commandements au "lever" et au "coucher", la Misha va discuter et réfléchir de l'heure du lever et du coucher. [38] P. Lenhardt et M. Collin, « La Torah orale des Pharisiens. Textes de la tradition d'Israël », Paris, Cerf, Supplément au Cahier Évangile n° 73, SBEV, 1990. [39]Le Guemara est un commentaire de la Mishna pour expliciter plus clairement le lien avec au Tanakh, c’est-à-dire la bible hébraïque écrite. [40] Le Talmud est la compilation de la Mishna et du Guemara. Le Talmud a pour but de retrouver le verset biblique qui serait à l'origine de la Loi orale. [41] John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. III : Attachements, affrontements, ruptures, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2005, p.565. [42]John-Paul Meier, Un certain Juif Jésus, vol. IV : La Loi et l'amour, Paris, Cerf, coll. « Lectio Divina », 2009, p.20. [43]Ibid.p.422-426. Compilé par Juda Hanassi au début du IIIème siècle de l'ère chrétienne, la Mishna désigne le premier recueil de la Loi juive orale (tradition pharisienne) et par conséquent de la littérature rabbinique. [44]K. Hermann, Religion in Geschichte und Gegenwart (RGG), 4 Auflage, Tubingen, 2007, col. 1386-1387.
Comments