Supplément au commentaire de la litanie pénitentielle "Christ, le Fils du Père"
- bohleremmanuel
- 16 oct. 2023
- 46 min de lecture
Supplément numérique au commentaire de la litanie pénitentielle "Christ, le Fils du Père".
Cote : GY50Texte : Bernard GEOFFROY ( )Musique : Tradition provençale/ Joseph GELINEAU (1920-2008)
Article mise en ligne par l’Union Sainte Cécile, dans la revue CAECILIA du Service Diocésain de Pastorale Liturgique et Sacramentelle, de musique et d’art sacré de l’archidiocèse de Strasbourg.
N°04, édition d'octobre 2023.

ANALYSE SYNOPTIQUE DES SOURCES LITURGIQUES
POUR L’HYMNE DU « GLOIRE A DIEU »
EXEMPLE CONCRET D’UNE TRADITION VIVANTE
Pour mieux comprendre, à la fois l’originalité mais en même l’enracinement au sein de l’hymnographie de l’antiquité chrétienne du texte de Bernard Geoffray ; mais aussi pour compléter l’analyse de Michel Steinmetz[1] publié au sein de la revue CAECILIA en 2005, ce complément numérique tentera de présenter un bref essai de synthèse de l’évolution progressive du texte de l’hymne Gloire à Dieu.
Pour cela nous allons entreprendre une brève synthèse philologique et archéologique de ce texte que le Cardinal Jean-Marie Lustiger (1926-2007), au sein de son commentaire de la messe[2], considérait comme une fascinante synthèse biblique dont la justesse théologique constitue un des plus beaux héritages du christianisme. Il écrivait à ce propos :
« C’est une hymne. En effet, dans la tradition liturgique catholique, à côté des psaumes dont je vous ai déjà dit l’importance primordiale et la place incontestée, figurent des « poèmes ». […] Il est donc remarquable et révélateur de sa qualité que le Gloria se soit ainsi enraciné dans la liturgie eucharistique et y soit demeuré sans interruption au fil des siècles. Cette hymne est une des plus belles pièces liturgiques qui soient. C’est un vrai trésor pour nourrir la prière aussi bien personnelle que communautaire.[3] »
La vénérabilité du texte de l’hymne « Gloire à Dieu » provient de son genre littéraire et de sa rédaction dont la souche originelle semble se confondre avec la rédaction des cantiques bibliques du nouveau Testament. Nous tenterons de montrer comment cette hymne eucharistique puise ses racines dans la tradition antiochienne de la « grande doxologie », hymne christologique que l’on chantait jadis à l’office du matin, au moment où le soleil se levait, et dont les origines remontent au moins au IIème siècle.
En effet, l’existence au sein de la messe de ce que l’on nomme « l’hymne angélique » est attesté par le Liber Pontificalis[4]. Cet ouvrage mentionne que le pape Télesphore (128-139) demande qu’elle soit introduite au sein de la liturgie eucharistique papale pour les fêtes de la Nativité. Le pape Symmaque (498-514) demande qu’elle soit chantée par tous les évêques, non seulement pendant les fêtes de la Nativité, mais aussi tous les dimanches et fêtes des martyrs. Selon les Sacramentaires grégoriens[5], les prêtres n’ont pas le droit de chanter l’hymne, sauf lors de la vigile pascale et le jour de leur ordination. En revanche, comme le montre le micrologus[6] de Bernold de Constance (1050-1100), il faudra attendre le IXème siècle pour que les prêtres puissent chanter l’hymne également les dimanches et fêtes.
Confirmée par le pape Innocent III (1160-1216), la mention concernant le pape Télesphore est capitale. Déjà parce qu’elle atteste la préexistence, aux environs du IIème siècle, d’une hymne suffisamment reconnue et vénérable pour quelle puisse être introduite dans la liturgie papale. Ensuite est-ce cette hymne du matin appelée « grande doxologie » que d’ailleurs l’Eglise d’Orient conservera par la suite pour les matines au moment où le soleil se lève ?
Cet état de fait implique trois questions : pourquoi faire entrer cette hymne plutôt qu’une autre au sein du canon de la messe, en particulier pour le temps de la Nativité ? Qu’a-t-elle de particulier ? Ensuite s’il y a préexistence de l’hymne, en avons-nous des traces dans des manuscrits ? Pouvons-nous retrouver le texte originel ? Enfin si l’hymne est « entrée » dans la liturgie eucharistique papale pour la Nativité, pour être ensuite progressivement généralisée au dimanche et fêtes pour la liturgie épiscopale et presbytérale au cours des siècles, a-t-elle été modifiée ? Autrement, dit y-a-t-il eut un phénomène d’hybridation ?
La mention du pape Télesphore implique, d’un point de vue de datation que nous sommes en présence d’une hymne originellement composée en grec. Or les recherches[7] montrent qu’il y a deux sources capitales qui portent les plus anciens témoignages grecs : le Codex Alexandrinus (Vème siècle) et les Constitutions apostoliques[8], écrites à Antioche vers la fin du IVème siècle. Ces deux sources nous mettent en présence d’une forme remaniée de la souche originelle du « Gloire à Dieu ».
Aussi, nous possédons deux articles d’érudition de Jules Lebreton[9] et de Dom Bernard Capel[10] qui traite de ces recherches sur les manuscrits en grec. Nous utiliserons le fruit de leurs investigations, complétées par des données nouvelles, au fur et à mesure de l’article.
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Que découvrons nous au sein des deux sources en grec ?
Au sein du Codex Alexandrinus[11] nous pouvons observer ce fait : dans le manuscrit de la Bible en grec, cette hymne se trouve rangée à la suite du psautier et des cantiques bibliques, comme pour attester, non seulement son autorité, mais aussi son lien narratif et compositionnel. De ce point de vue, la construction littéraire nous montre que sa facture est proche des psaumes et des cantiques bibliques, un peu comme s’il s’agissait d’une hymne-psaume.
En fait, il s’agit d’un vestige de la pratique répandu au Ier et IIème siècle des psalmi idiotici, c’est-à-dire de ces psaumes composés par des personnes privées au lieu d’être prises dans le psautier biblique. Ainsi l’hymne « gloire à Dieu » est originellement dans la lignée de ces hymnes christologiques chantées par les premières communautés chrétiennes dont on trouve des échos au sein des lettres pauliniennes ou pétriniennes. D’où son nom de « grande doxologie » puisque chantée le matin, au moment du lever du soleil. De plus, comme elle s’apparente aux cantiques bibliques, en particulier du Nouveau Testament, ces derniers avaient en outre une vocation théologique et doctrinale : on devait « éclairer » la foi des fidèles par un métissage biblique parfois complexe.
Voici le texte d’après le Codex Alexandrinus[12]. La traduction a été mise en page pour mettre en exergue les différents vers. Nous surlignerons en jaune ce qui semble provenir d’un ajout postérieur à la suite de la crise arienne.
Gloire à Dieu dans les hauteurs,
et paix sur la terre, bienveillance aux hommes.
Nous te louons, nous te bénissons, nous t’adorons,
nous te glorifions, nous te rendons grâce, pour ta grande gloire.
Seigneur, Roi céleste, Dieu Père tout-puissant,
Seigneur Fils unique, Jésus Christ,
et Saint-Esprit.
Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, Fils du Père,
toi qui ôtes le péché du monde, aie pitié de nous toi qui ôtes les péchés du monde, aie pitié de nous.
Reçois notre prière, toi qui sièges à la droite du Père, et aie pitié de nous.
Car tu es le seul Saint, le seul Seigneur, Jésus-Christ,
dans la gloire de Dieu le Père.
Amen
Ce vénérable manuscrit, qui est l’un des manuscrits les plus anciens et les plus complets de la Bible nous donne des informations précieuses sur cette « grande doxologie ».
Déjà quelle semble constituée de trois parties : une louange à Dieu qui s’ouvre à chacune des trois personnes de la Trinité. Nous verrons par la suite pourquoi l’ajout du Saint-Esprit semble tardif par rapport au reste de la louange. Puis vient une prière adressée exclusivement au Fils. Enfin une acclamation au Fils, dans la Gloire de son Père.
La prière au Fils mérite toute notre attention pour sa remarquable construction. Elle semble divisée en une introduction et deux sections : une centrée sur « l’agneau de Dieu », l’autre sur le « Fils glorifié » auprès de son Père.
Cette prière commence par désigner Jésus-Christ comme « Seigneur », « Agneau de Dieu » (liée à son incarnation) et « Fils du Père » (liée à sa divinité). Ainsi l’introduction désigne Jésus-Christ à la fois comme vrai homme et vrai Dieu, comme rédempteur et comme Sauveur. Aussi chacune des deux sections vont développer ces deux thématiques.
La section concernant l’Agneau de Dieu s’organise comme une véritable litanie avec la double répétition du refrain « prends pitié de nous ». Et puis la structuration du vers propose un effet d’accentuation décalant l’attention du refrain litanique vers sur celui qui ôte à la fois « le péché » et « les péchés », à la fois la racine (péché originel) et le mal commis (les péchés)! Le sujet de l’invocation est ici davantage mis en perspective par rapport au refrain litanique qui normalement, par sa répétition, devrait capter l’attention. Cette section met en exergue le mystère de la Passion de Jésus-Christ sur la Croix et sa mort rédemptrice. C’est bien sur la Croix que Jésus-Christ fit jaillir la source de Salut par le sang et l’eau versés comme le présente l’évangile de Jean. En fait, nous sommes en présence d’une litanie à l’Agneau de Dieu !
Cependant la deuxième section, bien que continuant la dynamique litanique par le refrain « prends pitié de nous », nous place dans une autre perspective. Nous ne sommes plus au pied de la Croix, mais déjà au Ciel. Jésus-Christ n’est plus le Crucifié, mais le Ressuscité dans la Gloire de son Père. Il est déjà désigné comme celui qui se trouve à la droite de son Père. C’est là qu’il intercède pour nous, en lui adressant les prières qu’il a rassemblé. C’est bien auprès de son Père, dans la Gloire, que le Christ se présente comme le « grand-prêtre » qui intercède en notre faveur. De ce fait, nous sommes là en parfaite cohérence avec l’enseignement de la Lettre aux Hébreux.
Cette prière christologique, enchâssée entre une louange et une acclamation, est très riche et convoque indirectement deux sources scripturaires : l’évangile de Jean et la Lettre aux Hébreux. Nous verrons si cela aura des incidences sur la suite.
Au côté du Codex Alexandrinus, l’autre source la plus ancienne de cette hymne en grec se trouve au sein des Constitutions apostoliques. Elle se trouve au sein du Livre VII dont la base de compilation est la Didaché (Ier siècle). Son emplacement est intéressant et nous communique une information capitale car il est situé dans un euchologue où il apparait comme une hymne pour le matin, puisque suit après lui une hymne pour le soir.
Avec les informations du Codex Alexandrinus, nous pouvons en déduire que la souche originelle du « Gloire est Dieu » est bien à trouver dans ces « hymnes-psaumes » (tradition des psalmi idiotici) du IIème siècle et que l’on chantait au lever du soleil (matines/laudes). Composée peut-être à Antioche qui Ier-IIème siècle est l’un des premiers centres et appuis du christianisme naissant, la souche originelle du « Gloire à Dieu» est un héritage de l’Eglise d’Orient[13]. Tradition que l’Eglise byzantine conservera alors que l’Eglise latine abandonnera progressivement.
Cependant l’étude des différents manuscrits[14] par Marcel Metzger[15] pour aboutir à l’édition critique et scientifique du texte dans la collection « Sources chrétiennes » a montré qu’il existe des divergences rédactionnelles. Il y aurait deux tendances suffisamment notables pour considérer que nous ne sommes pas en présence de la forme primitive mais d’un remaniement. Il semble donc acquis[16] que cette « grande doxologie » des Constitutions apostoliques est une version remaniée du texte souche servant d’hymne pour le matin.
Voici le texte issu des Constitution apostoliques. Nous vous proposons cette mise en page afin de mettre en lumière la construction rythmique et prosodique du texte. Les versets seront séparés par des lignes libres et nous reviendrons à la ligne pour mieux faire apparaitre le rythme des périodes et séquences.
Gloire à Dieu dans les hauteurs,
et paix sur la terre, bienveillance aux hommes[17].
Nous te louons, nous te célébrons, nous te bénissons[18],
nous te glorifions, nous t’adorons par ton grand pontife[19], toi le Dieu véritable,
unique et inengendré, le seul inaccessible, à cause de ta gloire immense,
Seigneur, Roi céleste, Dieu Père tout-puissant.
Seigneur, Dieu et Père du Seigneur, l’agneau irréprochable qui enlève le péché du monde[20],
reçois notre prière, toi qui trônes sur les chérubins[21] ;
Car toi seul es saint, toi seul es Seigneur, Dieu et Père de Jésus,
le Christ, le Dieu de toute nature créée, notre roi,
par qui à toi gloire, honneur et vénération.
Procédons maintenant à analyse comparative de ces deux sources.
Double questionnement complexe : narrative (le destinataire) et théologique (la subordination du Fils au Père) :
La comparaison des deux sources en grec met en exergue deux questions fondamentales qui sont entremêlées et que les chercheurs ont tentés de résoudre. L’évolution narrative du texte où, bien que conservant le sujet et l’action, on constate un changement du destinataire : d’une prière adressée au Christ on passe à une prière adressée au Père. Cette évolution narrative pose également une question historique et théologique relative à l’arianisme. Comme cette hérésie remettait en cause la divinité du Christ, elle avait en plus exagérée le principe de subordination vis-à-vis du principe d’égalité. Le Christ n’est plus l’égal du Père, mais son subordonné. Or le Concile de Nicée et celui de Constantinople vont réaffirmer ce principe d’égalité.
Ainsi certains scientifiques[22], dont Bernard Capel, ont analysé cette divergence rédactionnelle comme les signes d’une influence arienne au moment du remaniement du texte primitif. Mais n’y a-t-il que cela ? D’autres scientifiques[23], comme Jules Lebreton ont plutôt envisagé cette divergence rédactionnelle comme l’expression, non pas de l’arianisme, mais de vestiges plus anciens de la théologie d’Origène sur la prière et de Philon d’Alexandrie.
La comparaison des textes nous permet de mettre en lumière une organisation structurelle tripartite similaire : ils se composent de trois parties différentes : une louange, une prière, une acclamation conclusive (petite doxologie). Cette structuration tripartite est sans aucun doute la racine la plus antique de l’hymne. Mais une question fondamentale se pose pour chacune d’elle : qui en est le destinataire ? Pour cela comparons :
· La louange semble la partie la plus ancienne[24] (milieu du 2ème siècle). Il s’agit d’une louange adressée à Dieu dans le mystère de son unicité, sans aucune mention des personnes divines. Cependant la louange va conduire à une doxologie dont les divergences rédactionnelles attestent l’élaboration progressive de la théologie trinitaire face aux hérésies. Celle du Codex Alexandrinus se termine par une doxologie trinitaire, ce qui doit être un ajout tardif à la suite des hérésies ariennes et aux réaffirmations doctrinales trinitaires. La doxologie des Constitutions Apostoliques est adressée au Père et semble plus ancienne. On y fait mention indirectement du Fils avec les ajouts de « grand pontife » comme les attributs de type apophatiques, ce qui semble des ajouts typiques de la théologie des Constitutions Apostoliques issue de l’école d’Antioche avec les influences d’Origène. On peut noter l’absence de la mention du Saint-Esprit.
· La prière soulève plus de problèmes : Dans le Codex Alexandrinus elle s’adresse au Fils, alors que dans les Constitutions apostoliques, elle s’adresse au Père. Le propos de Jules Lebreton sera de montrer, à partir d’une analyse comparative des deux versions en grec, que la prière adressée au Fils est plus primitive qu’une adaptation en faveur du Père, et qu’elle n’est pas un ajout face à l’hérésie arienne mais un métissage avec la théologie de la prière d’Origène. Jules Lebreton va développer son argumentaire en trois points.
o Tout d’abord il est plus naturel de désigner le fils comme « agneau de Dieu » et destinataire de la demande, que de l’adresse au « Père du fils » en même temps que « Père de l’agneau ». Cette complexification rédactionnelle des Constitutions Apostoliques semble attester une version plus tardive de la « grande doxologie ».
o Ensuite l’expression « à la droite du Père » semble plus ancienne que « trône au-dessus des chérubins », si l’on pense précisément à l’ancienneté des formules du Symbole lors du baptême. De plus l’expression « trône au-dessus des chérubins » est plus christologique chez Justin et Irénée qu’adressée au Père. Dans les Constitutions Apostoliques VI 30 8-10 une longue doxologie montre que l’expression « trône au-dessus des chérubins » et vient après « à la droite du Père ». Mais surtout elle désigne le Fils et non le Père. D’ailleurs cela se trouve confirmé dans Didascalie VI 23 8, dont s’inspire le Livre VII. C’est pourquoi la souche originelle de la prière est bien adressée au Fils ! En conséquence la destination du Père au sein des Constitutions Apostoliques est plus tardive que la version au sein du Codex Alexandrinus. Aussi les Constitutions apostoliques ont transformé la destination en ôtant l’attribut christologique du Symbole, puis ont reconfiguré la narration pour l’adresser au Père, mais en désignant le Fils comme le Pontife qui prie pour nous auprès du Père.
o Enfin, en prenant appui sur deux exemples du Traité sur la prière d’Origène, Jules Lebreton montre comment la reformulation du texte semble être un métissage pour faire correspondre le texte originel à une certaine théologie de la prière. Nous devons à Origène cette conception que toute prière doit être adressée au Père, par un seul médiateur, un seul pontife, le Fils présenté comme « grand-prêtre ». Cette théologie de la prière d’Origène est en parfait synchronie avec le contenu théologique de la Lettre aux Hébreux, mais aussi celui de la « prière sacerdotale » selon l’évangile de Jean. Il s’agit par conséquent de l’héritage des communautés chrétiennes issues du judaïsme. Cette conception de la prière développée par Origène se trouve d’ailleurs exprimée à travers la construction narrative des oraisons : à savoir une prière que l’on adresse au Père se conclue par la formule « nous te le demandons par Jésus-Christ, ton Fils… ». Jules Lebreton montre comment la reformulation de la prière de la « grande doxologie » au sein des Constitutions Apostoliques passant d’une prière adressée au Christ à une prière adressée au Père, atteste une rencontre entre texte liturgique et vision théologique, où le texte liturgique est un authentique acte théologique ! Aujourd’hui, on considère que la théologie des Constitutions apostoliques est bien orthodoxe et non arienne, mais avec des influences d’Origène et de Philon d’Alexandrie que précisément on retrouve dans la souche originelle de l’hymne Gloire à Dieu. D’autant que le Codex Alexandrinus nous montre que la prière adressée au Christ semble puiser aux mêmes sources scripturaires que la théologie de la prière d’Origène. Ce qui confirme également l’hypothèse d’une influence bien plus ancienne que la crise arienne !
· L’Acclamation conclusive (ou petite doxologie) pose également les mêmes problèmes d’évolution rédactionnelle. Au sein du Codex Alexandrinus, elle commence par s’adresser au Fils acclamé comme « saint » pour ensuite glorifier Dieu dans le mystère de son unité. Cette acclamation christologique comme « le seul saint » est très ancienne et semble puiser ses racines dans l’antique Trisagion[25]. Or dans les Constitutions Apostoliques, elle est adressée au Père en mentionnant le Fils : cela s’apparente, comme pour la prière, à une réécriture postérieure. A noter que dans l’un et l’autre cas, on ne mentionne pas le Saint-Esprit. On peut également y discerner une influence de la théologie d’Origène de la prière.
Concernant les Constitutions Apostoliques, il est très étonnant de constater, pour un texte remanié et produit à Antioche dont on sait que son école théologique s’est opposée à celle d’Alexandrie, une influence ancienne d’Origène, figure illustre appartenant à cette dernière. Marcel Metzger mentionne qu’il y a plusieurs niveaux de divergences : autant il y a une divergence avec l’Alexandrinus, autant il y a des divergences au sein des manuscrits des Constitutions apostoliques concernant cette « grande doxologie ».
Si les recherches sont certaines que la partie de la prière du « Gloire à Dieu » est bien adressée au Christ et non au Père, cela soulève d’autres questions qui dépassent le cadre d’une analyse philologique et archéologique d’un texte. Pourquoi la forme originelle se trouve-telle dans un manuscrit alexandrin du Vème siècle et que ce dernier ne porte pas de trace de l’influence d’Origène, alors que le manuscrit du IVème siècle de l’école d’Antioche porte quant à lui la trace d’une influence de l’école alexandrine ? Cette analyse nous montre la complexité passionnante des échanges entre les différentes écoles théologiques !
Alors pourquoi constater un tel remaniement ? Autant de divergences qui changent complètement la nature du texte ? En effet, nous ne sommes plus sur le registre d’ajouts ou d’omissions, mais d’une volonté de transformer théologiquement le texte originel. Autrement formulé, pourquoi y-a-t-il eu ce remaniement, ce métissage, cette réécriture entre la souche originelle et la conception théologique de la prière d’Origène ? Qu’est-ce qui pourrait justifier une telle rencontre ?
Les recherches de Jules Lebreton confirmées par Marcel Metzger, au lieu de jeter un certain discrédit sur les Constitutions Apostoliques parce « trop ariennes », semblent au contraire, par les divergences avec le Codex Alexandrinus, nous amener à ces quelques considérations que nous développerons ultérieurement.
Pour l’instant tentons de mettre en lumière la structure originelle de la « grande doxologie » à partir de ces deux sources.
Essai de synthèse structurelle
Cette analyse comparative des deux sources nous permet de mettre à jour, en tenant compte des divergences rédactionnelles, une structuration originelle de cette « grande doxologie » et surtout d’y cerner le destinataire :
· Elle commence par une louange adressée au Dieu « unique » conduisant à une doxologie adressée au Père puis au Fils.
· Ensuite il y a une prière litanique adressée au Fils dont la demande litanique « prends pitié de nous » provient de l’héritage antique de l’Orient, que l’on retrouve en particulier exprimé dans le Trisagion.
· Enfin une acclamation conclusive adressée au Fils comme « seul saint » puis à Dieu dans le mystère de son unicité. Par conséquent, nous sommes bien en présence d’une hymne christologique, comparable à celles du Nouveau Testament.
On peut aisément comprendre pourquoi elle trouve sa place lors des fêtes de la Nativité et que c’est par elles qu’elle est entrée dans la liturgie eucharistique. Et surtout pourquoi le Codex Alexandrinus la plaça avec les psaumes et cantiques bibliques !
Ensuite cette « grande doxologie », même si elle commence par une louange adressée au Dieu « unique », nous place au sein d’une relation spécifique entre la personne du Père, objet de l’action de grâce, et la personne Fils devenu comme notre intercesseur, notre « prêtre » auprès de Lui. C’est « par lui » que nos prières sont adressées au Père, c’est « par Lui» que l’on glorifie le Père. C’est hymne christologique met parfaitement en lumière une certaine conception de type « sacerdotale » de la personne du Fils. Or cette structuration rédactionnelle, cette « glorification » du Père par le Fils n’est-elle pas l’expression de la théologie de la prière selon l’évangile de Jean ? N’avons-nous pas ici les vestiges antiques d’une influence du milieu johannique ? C’est un peu comme si cette « grande doxologie » puisait son inspiration théologique dans l’évangile de Jean et en particulier dans la « prière sacerdotale » en Jn 17 ? Si Jésus-Christ y a promis de prier son Père pour tous ceux qui croiront en son Nom, par le chant de cette « grande doxologie » les fidèles font mémoire de cette promesse : on demande au Fils d’intercéder pour nous auprès de son père. De plus, ce lien théologique et narratif avec l’évangile de Jean pourrait nous aider à comprendre l’absence apparente de la personne du Saint-Esprit. En effet, tel est le paradoxe de l’évangile de Jean où sa pneumatologie est présente, mais indirecte, cachée.
Enfin n’y aurait-il pas l’influence de la théologie de la Lettre aux hébreux présentant la figure de Jésus-Christ comme le « grand-prêtre » ? Tout nous porte à croire que la structure narrative originelle et la conception théologique de cette « grande doxologie », malgré les divergences rédactionnelles, puisent leurs racines dans l’Ecriture au sein d’un christianisme marqué par le milieu johannique (évangile de Jean) et le judaïsme (Lettre aux hébreux). Or ce qui est intéressant, c’est qu’Origène pour composer son Traité de la prière, va puiser dans ces mêmes sources scripturaires pour développer sa conception théologique ! Ne sommes-nous pas en présence d’une évolution théologique d’une hymne, due aux influences d’une nouvelle herméneutique des mêmes sources ? C’est un peu comme si l’influence d’Origène dans les Constitutions Apostoliques avait pour but de faire encore mieux correspondre le texte de l’hymne à la conception théologique des textes sources scripturaires qui lui sont contingentes. Mais cette hypothèse dépasse le cadre de notre article.
Or, tout aussi paradoxal que cela puisse paraître, nous avions remarqué que la prière christologique issue du Codex Alexandrinus semble puiser à la même conception et aux mêmes sources scripturaires qui ont pourtant, par effet théologique, apporter une reconfiguration significative de la narration au sein des Constitutions Apostoliques ! Ce paradoxe n’est-il pas le signe que nous sommes en présence d’une tradition vivante ?
En revanche, au IVème siècle, il y eut un évènement de taille qui fut l’édit de Constantin (313). Une des conséquences de cet édit sera le changement progressif de la langue liturgique : du grec on passe au latin. Ainsi va se lancer un grand travail de traduction liturgique du grec au latin.
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Que découvrons nous au sein des sources en latin ?
Autant le Codex Alexandrinus et les Constitutions Apostoliques mettent en notre présence une version remaniée de l’hymne christologique souche, autant nous devons aux sources latines d’avoir aussi permis d’accéder à des textes grecs très anciens : en particulier une autre version de « la grande doxologie » que l’on chantait cette fois au lever du soleil ! Deux autres sources sont à notre disposition. Nous allons les présenter, puis les comparer.
La « grande doxologie » conservée dans l’Eglise Byzantine (VIème siècle)
En effet, l’Eglise Byzantine conserve encore aujourd’hui pour l’Office des Matines cette version tardive de la « grande doxologie » datée du VIème siècle. En voici la traduction avec les références bibliques sous-jacentes venant de l’analyse de David Masroberte[26]. Grâce à ce travail, nous pouvons prendre conscience de la richesse biblique, en particulier des versets de psaumes, que compilent les multiples périodes des versets du texte. On peut encore mieux comprendre pourquoi le Codex Alexandrinus plaça la « grande doxologie » avec les psaumes et les cantiques bibliques.
Nous proposons cette mise en page pour mettre en exergue la construction narrative et les versets avec les différentes périodes et leur rythme tripartite. Sont surlignées les parties qui semblent être des ajouts tardifs. Nous mettrons également par moment ce signe « / » pour marquer la division des périodes.
Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre, bienveillance parmi les hommes[29].
et Saint-Esprit[40] ;
toi qui ôtes le péché du monde[44], / aie pitié de nous[45], / ô toi qui ôtes les péchés du monde[46]
dans la gloire de Dieu le Père[52]. Amen.
Chaque jour je te bénirai et louerai ton Nom dans les siècles des siècles[53].
Daigne, Seigneur, nous garder ce jour sans péché[54].
Tu es béni, Seigneur, Dieu de nos pères, et ton Nom est loué et glorifié dans les siècles[55]. Amen.
Que ta miséricorde, Seigneur, soit sur nous, comme nous avons espéré en toi[56].
Tu es béni, Seigneur, enseigne-moi tes commandements[57]. (3 fois)
Seigneur, tu as été pour nous un refuge d'âge en âge[58].
J'ai dit : Seigneur, aie pitié de moi et guéris mon âme, car j'ai péché contre toi[59].
Seigneur, je me suis réfugié auprès de toi, enseigne-moi à faire ta volonté, car tu es mon Dieu[60].
Car auprès de toi est la source de la vie, et dans ta lumière nous verrons la lumière[61].
Étends ta miséricorde sur ceux qui te connaissent[62].
Gloire au Père et au Fils et au Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles[67]. Amen.
Saint Immortel, aie pitié de nous
Saint Dieu, Saint Fort, Saint Immortel, aie pitié de nous.
Cette version nous confirme des éléments trouvés par l’étude comparative entre les deux sources en grec les plus anciennes. Mais elle apporte en outre des informations nouvelles. Déjà nous retrouvons la synthèse structurelle à savoir :
· une louange au Dieu unique s’ouvrant au Père puis au Fils,
· une prière adressée au Fils, qui reprend l’ensemble des termes du Codex Alexandrinus mais omettant un refrain litanique pour renforcer la structure ternaire systématique de chaque partie de vers. On y met en exergue l’Agneau de Dieu et le Fils glorifié à la droite du Père.
· une acclamation au Fils puis au Père.
De plus, la seule mention ajoutée du « Saint-Esprit » montre que cette hymne nous place dans la relation de type « sacerdotale » entre le Père et le Fils. Même si la mention de « pontife » n’est plus là, c’est bien Lui qui rassemble la prière des hommes pour intercéder en notre faveur auprès de son Père. C’est bien Lui, le seul saint, qui nous fait entrer dans la Gloire du Père. C’est Lui, le seul saint, qui nous glorifie en nous faisant partager la Gloire qu’il tient de son Père[68] comme Fils unique. Nous y retrouvons finalement toute la théologie propre à la prière sacerdotale[69] dans l’évangile de Jean annoncée dès le Prologue.
Cependant nous y trouvons en complément des versets de psaumes qui sont à la fois des supplications et des louanges. Cependant nous pouvons y discerner deux strates d’époques différentes.
· Il y a tout d’abord les trois premiers versets qui constituent un premier ensemble puisqu’ils se concluent par « Amen ». Sans doute est-ce la strate la plus ancienne qui remonte peut-être aux origines puisque les deux premiers versets sont également utilisés dans l’hymne Te Deum. Ces trois versets forment comme un ensemble concret, surtout au lever du jour, donnant sens à la journée : louer Dieu et être préservé du péché. Autrement vivre déjà, durant la vie terrestre du jour à venir, de la vie béatifique où les saints louent Dieu. Ce qui correspond parfaitement à la vision d’Isaïe[70], reprise et déployée par le Livre de l’Apocalypse[71].
· Puis s’enchaine une série de sept versets formant une extraordinaire litanie pour implorer la Miséricorde de Dieu. Cette litanie a un caractère plus pénitentiel, puisque l’on reconnait que l’on est marqué par le péché, d’où cette imploration pour que Dieu nous prenne en pitié. Nous ne sommes plus tant sur le registre de la louange que de la supplication. Aussi ce caractère suppliant de la Miséricorde suggère un contraste, non seulement avec le caractère général de l’hymne, mais allant jusqu’à une rupture avec les trois premiers versets. Par cette rupture, ne peut-on pas légitimement se demander s’il ne s’agit pas d’un ajout plus tardif ?
Ainsi, dans la logique narrative avec ce qui précède, on acclame le Christ comme le « seul saint » dans la Gloire de son Père et l’on demande à participer déjà, durant la journée qui vient, à cette même Gloire. Puis on invoque la Miséricorde de Dieu pour être purifié en vue de participer à cette même Gloire, c’est-à-dire devenir également saint comme lui-même est saint. C’est pourquoi, en toute logique narrative avec ce deuxième cycle de versets à caractère plus pénitentiel, il y a l’antique Trisagion qui vient conclure cette litanie à la Miséricorde de Dieu : c’est bien elle qui est au centre !
Hormis la doxologie finale et la mention du Saint-Esprit qui sont des ajouts post-nicéens, la question demeure de savoir si la présence de ces deux cycles de versets de psaumes avec le Trisagion est antérieure ou postérieure aux versions remaniées du Codex Alexandrinus et des Constitutions Apostoliques. La question n’est pas encore statuée, mais bien des chercheurs pensent que la présence de versets de psaumes est bien un usage antique que l’on a trop souvent considérée comme un ajout tardif. Le contraste des deux cycles va dans ce sens.
En tous cas la forme complexe de cette hymne christologique met en évidence, au-delà de la construction tripartite de bien des périodes des versets, des structures en chiasme enchâssées. On peut comprendre que les ajouts successifs n’ont pas altérées la cohérence de construction de l’hymne.
· 1er chiasme : Louange au Père puis au Fils - Prière au Fils – Acclamation au Fils « seul saint » puis au Père.
· 2ème chiasme : Acclamation au Christ « seul saint » et au Père - versets de psaumes – Trisagion « Saint Dieu »
· 3ème chiasme : Trisagion – Doxologie – Trisagion en miroir.
Ces trois structures en chiasme ne font qu’accentuer le lien logique entre les parties, mais surtout la personne du Fils. Nous sommes bien en présence d’une hymne christologique.
A côté de l’héritage de l’Eglise d’Orient, attardons-nous maintenant à voir ce qui se passe pour l’Eglise latine.
L’antiphonaire de BANGOR (VIIème siècle)
Si l’édit de Constantin constitua une date charnière pour la liturgie, puisque l’on passera progressivement du grec au latin, la période de traduction fut une authentique période de transition.
Notre étude tentera de montrer ce qu’apporte comme convergence, ou comme divergence, la traduction latine de l’hymne utilisée par l’Eglise Byzantine.
La tradition veut que ce fusse Hilaire de Poitiers (315-367) qui ait traduit en latin le texte de l’hymne en grec. On pense qu’on lui doit l’ajout de « laudamus te ».
Le manuscrit le plus ancien de la version latine qui nous donne accès à cette hymne christologique pour l’office du matin se trouve dans l’antiphonaire de Bangor[72](VIIème siècle) qui servait pour les moines irlandais de la réforme de saint Colomban. Ces derniers chantaient comme hymne pour les Laudes le même texte que l’Eglise Byzantine, qui au VIème fixa définitivement le texte de la « Grande doxologie » et que l’on chante aux matines. C’est donc à partir de lui que nous pourrons mesurer ce qui se passa au moment de la traduction du grec au latin.
Nous pouvons constater qu’au VI-VIIIème siècle il y a plusieurs versions différentes de l’hymne qui cohabitent : la « grande doxologie » pour l’office du matin et ce que l’on nommera « l’hymne angélique » pour la messe romaine. Sans oublier la « grande doxologie » remaniée du Codex Alexandrinus et des Constitutions Apostoliques. Ainsi l’hymne « Gloire à Dieu » est devenue, au fil de temps, une hymne polymorphe !
Nous mettrons tout d’abord le texte latin de la « grande doxologie » pour l’office du matin issue de l’antiphonaire de Bangor. Nous ferons apparaitre la structuration du texte, nous surlignerons ce que l’on peut considérer comme des ajouts tardifs.
Annonce évangélique :Gloria in excelsis Deo, et in terra pax hominibus bonae voluntatis.
Louange au Dieu unique : Laudamus te, benedicimus te, adoramus te, glorificamus te, magnificamus te,
gratias agimus tibi, propter magnam misericordiam tuam,
puis trinitaire : Domine, rex coelestis, Deus, Pater omnipotens.
Domine, Fili unigenite, Jesu Christe,
Sancte Spiritus Dei, et omnes dicimus, Amen.
Prière adressée au Fils : Domine, Fili Dei Patris, Agnus Dei, qui tollis peccatum mundi, miserere nobis.
Suscipe orationem nostram, qui sedes ad dexteram Dei Patris, miserere nobis.
Acclamation christologique : Quoniam tu solus sanctus, tu solus Dominus, tu solus gloriosus
puis trinitaire : cum Spiritu Sancto
in gloria Dei Patris. Amen.
Versets de psaumes :
(1.) Cotidie benedicimus te, et laudamus nomen tuum in aeternum et in saeculum saeculi. Amen.
(2.) Dignare, Domine, die ista sine peccato nos custodire.
(3.) Benedictus es, Domine, Deus patrum nostrorum, et laudibile et gloriosum nomen tuum in saecula. Amen.
(4.) Miserere nobis, Domine, miserere nobis.
(5.) Verba mea auribus [percipe, Domine, intellige clamorem meum. Intende voci orationis meae, rex meus] et Deus meus.
(6.) Mane et exaudies vocem meam.
(7.) Mane oratio meai praeveniet te, Domine.
(8.) Diebus atque noctibus, horis atque momentis, miserere nobis, Domine.
(9.) Orationibus ac : meritis sanctorum tuonam miserere [nobis, Domine].
(10.) [Orationibus ax : meritis] angelorum archangelorum, patriarcarum, prophetarum, miserere nobis, Domiae.
(11.) [Orationibus ac meritis] apostolorum martyrum, et confessorum, atque universae gradus sanctorum, miserere [nobis, Domine.]
Doxologie finale :
Gloria et honor Patri, et Filio, et Spiriui Sancto, et nunc, et semper, et in saecula saeculorum. Amen.
En voici une possible traduction :
Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes de bonne volonté.
Nous te louons, nous te bénissons, nous t'adorons,
nous te glorifions, nous te magnifions, nous te rendons grâce pour ta grande miséricorde
Seigneur, roi céleste, Dieu, Père tout-puissant.
Seigneur, Fils unique, Jésus-Christ,
Saint-Esprit de Dieu, et nous disons tous : Amen.
Seigneur, Fils de Dieu le Père, Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde, aie pitié de nous.
Reçois notre prière, toi qui es assis à la droite de Dieu le Père, aie pitié de nous.
Parce que toi seul es saint, toi seul es Seigneur, toi seul es glorieux
avec le Saint-Esprit, dans la gloire de Dieu le Père Amen.
(1.) Nous te bénissons quotidiennement et louons ton nom pour toujours et à jamais[73]. Amen.
(2.) Daigne, Seigneur, nous garder sans péché ce jour-là[74].
(3.) Tu es béni, Seigneur, le Dieu de nos pères, et ton nom est louable et glorieux pour toujours[75]. Amen.
(4.) Aie pitié de nous, Seigneur, aie pitié de nous[76].
(5.) Mes paroles à tes oreilles [perçois, Seigneur, comprends mon cri. Écoute la voix de ma prière, mon roi] et mon Dieu[77].
(6.) Reste et entend ma voix[78].
(7.) Le matin, ma prière te précédera, Seigneur[79].
(8.) Jours et nuits, heures et moments, aie pitié de nous. Seigneur[80].
(9.) Par les prières et les mérites des saints, aie pitié [de nous, ô Seigneur][81].
(10.) [Par les prières des mérites] des anges, des archanges, des patriarches et des prophètes, aie pitié de nous, Seigneur[82].
(11.) [Par les prières et les mérites] des apôtres, des martyrs et des confesseurs, et de tous les rangs des saints, ayez pitié [de nous, ô Seigneur.][83]
Gloire et honneur au Père, au Fils et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et pour toujours et à jamais. Amen.
En analysant ce texte latin considéré comme la source la plus ancienne de la traduction latine du texte grec, nous pouvons remarquer ceci :
Tout d’abord concernant les ajouts trinitaires tardifs (IV-Vème siècle), cette hymne est légèrement amoindrie dans sa dimension christo-centrée. Bien que nous retrouvions la même synthèse structurelle, nous pouvons cependant remarquer ceci :
· une louange au Dieu unique s’ouvrant au Père, au Fils et au Saint-Esprit, dont la narration parfaitement équilibrée atteste une parfaite dimension trinitaire d’égalité des personnes divines.
· Si la prière est bien adressée au Christ, on met davantage en exergue sa divinité (Fils du Père, assis à la Droite du Père) plutôt que son humanité par le fait qu’il soit l’Agneau de Dieu.
· une acclamation au Fils puis au Saint-Esprit et au Père. Là aussi, la narration équilibrée atteste une parfaite dimension trinitaire d’égalité des personnes divines.
Ainsi, cette mise en exergue de la divinité du Fils montre que ces ajouts relèvent explicitement de la lutte contre l’arianisme qui précisément remettait en cause la divinité du Fils. Mais cela montre en outre une conception d’un langage trinitaire déjà bien élaboré.
Ensuite il y a également une double série de versets en complément. Mais nous pouvons observer ceci :
· Il y a les trois premiers versets qui constituent un premier ensemble puisqu’ils se concluent par « Amen ». Ils sont les mêmes que pour la version en grec utilisée par l’Eglise Byzantine. Cette similitude semble confirmer qu’il s’agit de la strate la plus ancienne qui remonte peut-être aux origines.
· Ensuite il y a une deuxième série constituée non pas de sept mais de huit versets. Nous pouvons déjà remarquer qu’il ne s’agit pas uniquement de versets de psaumes, mais aussi d’antienne et de compilations avec d’autres textes liturgiques. Cette deuxième série semble donc plus récente que dans la version en grec utilisée par l’Eglise de Byzance. Cependant on peut y remarquer un accent pénitentiel et surtout litanique encore plus prononcé. Déjà parce que l’expression psalmique « aies pitié de nous, Seigneur, aies pitié de nous » constitutive du refrain litanique, se retrouve non seulement citée seule et en exergue de la série comme on donnerait le ton, mais en plus régulièrement compilée avec d’autres sources liturgiques. Cette série est donc volontairement litanique, et la dimension pénitentielle très accentuée. C’est un peu comme si ce cycle de versets prolongeait, par parallélisme, la prière christologique litanique ! Nous pouvons le penser puisqu’au centre de cette litanie se trouve quelqu’un qui se reconnait pécheur et qui invoque avec insistance que Dieu le prenne en pitié. Mais surtout il y a la présence du texte de la Litanie des saints où le Christ est au centre des invocations. Ce qui nous permet de dire que le destinataire de cette litanie est bien le Fils, l’agneau de Dieu, qui enlève les péchés du monde ! Nous sommes en présence d’une forme litanique, pénitentielle et christologique, d’un pénitent qui s’inspire et prolonge la prière christologique ! Cet ajout compositionnel développe synchroniquement ce que nous avions découvert de la prière au Fils au sein du Codex Alexandrinus. Cependant une dimension de carême est à remarquer. Or cette compilation n’est-elle pas en lien avec ceux qui la promeuvent dans leurs livres liturgiques, à savoir ces moines irlandais, dont l’action a commencé vers le Vème siècle pour rayonner avec saint Colomban (VIème siècle) ? On connait l’impact incontournable de ces moines irlandais pour la compréhension théologique et la pratique du sacrement de la pénitence et de la Réconciliation dans l’histoire de l’Eglise latine. D’ailleurs l’absence du Trisagion dans la version latine, remplacé par des invocations envers la prière et les mérites de tous les saints, ne fait encore qu’accentuer cette dimension pénitentielle du pécheur envers Celui qui enlève les péchés du monde. Cette série met davantage en exergue le pénitent qui se reconnait pécheur plutôt que la source de la Miséricorde qu’est l’Agneau de Dieu. Nous ne sommes plus uniquement dans le cadre d’une litanie à la Miséricorde de Dieu, mais bien dans une litanie de type pénitentielle et christocentrée !
Ainsi, dans la logique narrative de cette tradition latine de l’hymne pour les laudes perpétuée par les moines irlandais, nous pouvons constater un changement paradigmatique par rapport à l’Eglise d’Orient : la dimension pénitentielle et christologique, avec une accentuation de la dynamique litanique !
Déjà parce que le terme « gloire » a été changé par « Miséricorde » au sein de la louange comme si l’on mettait en avant le pardon que l’on demandera avec insistance.
De plus on commence par mettre davantage en exergue la divinité du Fils, on acclame le Christ comme le « seul saint » dans la Gloire de la Trinité et l’on demande à participer déjà, durant la journée qui vient, à cette même Gloire (souche identique avec l’Eglise d’Orient). Mais, avec la deuxième série de versets, par changement de ton radical, on se reconnait davantage pécheur et on invoque la pitié de Celui qui enlève les péchés du monde ! Cette invocation se fera avec insistance grâce à l’accentuation de la dynamique litanique due au choix des versets de psaumes, mais aussi avec l’ensemble de la prière des saints. Même si cette série met en exergue le refrain litanique hérité de l’Orient, ce dernier se contextualise dans une démarche pénitentielle où le pécheur semble au centre, et non plus la source de la Miséricorde. Autant la synthèse structurelle met en exergue le « fils de Dieu, assis à la droite du Père », autant le complément de versets met indirectement en exergue « l’Agneau de Dieu » mais dans une dynamique pénitentielle et non plus contemplative comme pour les versions anciennes en grec ! En fait cette série de versets, tout en s’inspirant complètement de la litanie caractéristique de l’Orient et surtout de la prière au Fils du Codex Alexandrinus, en modifie le contexte, et par là même le sens ! Paradoxalement cette série de versets, du fait de ses sources, est plus tardive que la série versets issue de la « grande doxologie » de l’Eglise de Byzance, mais de conception, elle se rapproche et déploie avec plus de force la constitutions narratives des textes anciens. Ne sommes-nous pas face à une tradition vivante où l’on fait de neuf en perpétuant les intuitions constitutives et organiques de l’ancien ?
Enfin, même si nous sommes en présence d’une hymne christologique, bien qu’amoindrie par le rééquilibrage trinitaire, on semble plus se concentrer, à la fin, sur un aspect litanique et pénitentiel que sur la glorification ! L’absence du Trisagion va dans ce sens. Or n’est-ce pas une différence fondamentale que l’on retrouvera entre la théologie occidentale et orientale ? N’y-a-t-il que ce point de divergence ?
Analyse comparative de ces deux sources
Nous pouvons noter qu’au sein de la version en grec du VIème siècle issue de l’Eglise Byzantine, ou bien la traduction latine de l’antiphonaire de Bangor (VIIème siècle) il y a une stabilité structurelle d’ensemble que l’on peut résumer ainsi : louange, prière au Christ, acclamation, 2 cycles de versets dont une forme litanique, Trisagion/Doxologie. Cette stabilité structurelle peut être considérée comme le signe de la forme fixe de l’hymne, et cela au-delà des différences terminologiques. En revanche, hormis les différences dues aux ajouts trinitaires (héritage de la lutte contre l’arianisme), la différence essentielle se situe au niveau des cycles de versets.
Cependant la question de la présence des cycles de versets dès l’origine au sein de la forme la plus antique de l’hymne pose toujours question. Comme nous l’avions remarqué, la traduction latine de l’hymne grec a conservé la présence de cet « Amen » de séparation entre les deux cycles. Cela atteste bien les différentes couches de rédaction. Peut-être même est-ce une preuve qu’avant la forme remaniée dans le Codex Alexandrinus et les Constitutions Apostoliques, il y avait des versets de psaumes dans la souche originelle de l’hymne !
Observons au passage que la traduction latine a conservé plusieurs « amen » qui viennent comme séquencer l’hymne. Un « amen » permettant de clôturer la louange initiale, puis un « amen » permettant de clôturer les acclamations. ». Il est tout à possible de considérer ces trois « amen », non pas comme des ajouts tardifs mais comme une trace d’archaïsme, de vestiges primitifs. Ainsi, même si le manuscrit de l’antiphonaire de Bangor est plus tardif (VIIème siècle) que celui de la version utilisée par l’Eglise Byzantine (VIème siècle), il met en exergue une souche de l’hymne plus ancienne. Puisque les études scientifiques ont montré que le Codex Alexandrinus et les Constitutions Apostoliques ne proposent qu’une forme remaniée de l’hymne originelle, il est alors possible d’émettre l’hypothèse qu’à travers la traduction latine de l’antiphonaire de Banglor nous sommes en présence de la forme originelle de cette hymne christologique pour l’office du matin à savoir : louange, prière au Fils, acclamations, cycle de trois versets. Par conséquent, le deuxième cycle de versets comme le Trisagion peuvent être considéré comme des ajouts successifs.
Ce qui pourrait rendre compte de la différence entre le deuxième cycle de verset utilisé par l’Eglise Byzantine et celui de la traduction latine. D’ailleurs, autant le premier cycle est en lien avec la Vie Béatifique et la Glorification, et semble très ancien ; autant le second cycle possède un caractère litanique et pénitentiel, dont le centre comme le destinataire ne sont pas les mêmes et qui semble plus récent. Pour l’hymne en grec de l’Eglise Byzantine, le centre est la Miséricorde et le destinataire semble Dieu. Cependant pour l’hymne traduite en latin, le centre est le pénitent quant au destinataire il s’agit du Christ, l’Agneau de Dieu !
Ces deux différences caractérisent non seulement la différence entre la théologie latine et la théologie orientale, mais surtout la présence d’ajouts successifs. Cependant la logique de construction narrative de ces deux versions reste cohérente pour les deux versions de l’hymne. Etant donné que l’analyse comparative entre le Codex Alexandrinus et les Constitutions Apostoliques a montré que la prière de l’hymne est bien adressée au Christ, peut-être que le deuxième cycle de versets de la traduction latine de l’hymne, résolument christologique et litanique, bien que plus récent, s’inspire justement d’une souche plus ancienne que pour la version de l’Eglise Byzantine ? Ces différences, au lieu d’être obstacle, attestent plutôt une tradition vivante de l’hymnographie !
En revanche, la comparaison entre la version en grec de l’hymne et sa traduction en latin met en lumière quelques modifications dont il convient de faire mention. Nous allons les mentionner à partir de la traduction en français.
Commençons par noter que la traduction en latin a supprimé des périodes tripartites des vers (construction en chiasme) et surtout les redondances caractéristiques de l’Orient. En voici un exemple :
Texte en grec
Traduction en latin
Seigneur Dieu, / Agneau de Dieu, / Fils du Père,
toi qui ôtes le péché du monde, / aie pitié de nous, / ô toi qui ôtes les péchés du monde
Seigneur, / Fils de Dieu le Père, / Agneau de Dieu,
toi qui enlèves le péché du monde, / aie pitié de nous.
Ensuite, on peut noter des modifications, non pas terminologique au sens strict, mais de grammaire engendrant un sens nouveau des termes.
Texte en grec
Traduction en latin
Seigneur, / Roi, / Dieu céleste / et Père tout-puissant
Seigneur, / roi céleste, / Dieu, / Père tout-puissant.
Enfin, on peut noter des remplacements ou des ajouts de termes et qui ne relèvent pas explicitement des ajouts trinitaires pour lutter contre l’arianisme.
Texte en grec
Traduction en latin
nous te glorifions, / nous te rendons grâce / pour ta grande gloire
Car tu es le seul Saint, / le seul Seigneur, / Jésus-Christ
dans la gloire de Dieu le Père. Amen
nous te glorifions, / nous te magnifions, / nous te rendons grâce pour ta grande miséricorde
Parce que toi seul es saint, / toi seul es Seigneur, / toi seul es glorieux
avec le Saint-Esprit, dans la gloire de Dieu le Père Amen.
Avec ce dernier cas, nous savons que la traduction en latin de « l’hymne angélique » de la messe va connaitre des ajouts de ce même type avec par exemple le terme « Tu solus altissimus » en remplacement du terme « tu solus gloriosus ».
Pour mieux mettre en perspective ce travail comparatif, vous pourrez trouver en annexe un tableau de synthèse avec les quatre sources que nous venons d’étudier avec le texte définitif de l’hymne « Gloire à Dieu » au sein de la messe et qui date probablement du VIème siècle.
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SYNTHESE :
Que pouvons-nous savoir de la souche originelle du « Gloire à Dieu » ?
Avec ce travail d’analyse comparative sur quatre manuscrits nous pouvons faire cette proposition.
La « grande doxologie », hymne christologique (IIème-IIIème siècle), composée en grec puis traduite en latin, chantée le matin au lever du soleil, devait adopter cette structure originelle primitive :
· Louange commençant par les paroles des anges annonçant la naissance du Sauveur (Lc 2,14).
· Prière adressée au Christ
· Acclamations
· Cycle de trois versets de psaumes.
Les autres cycles de versets de psaumes, le Trisagion, et d’autres ajouts relatifs à la théologie trinitaire se sont progressivement ajoutés à cette structure originelle primitive.
Ensuite la « grande doxologie » dans sa forme remaniée (IVème et Vème siècle), composée en grec et chantée le matin au lever du soleil, est sans doute celle qui deviendra « l’hymne angélique » et que l’on a adopta pour la liturgie eucharistique. Voici sa structure :
· Louange commençant par les paroles des anges annonçant la naissance du Sauveur (Lc 2,14).
· Prière adressée au Christ
· Acclamations
Il semble cohérent de garder la structure originelle primitive et d’ôter le cycle de trois versets de psaumes lorsque la « grande doxologie » est utilisée dans un cadre eucharistique. En effet ce dernier concerne concrètement le jour à venir. De plus les ajouts terminologiques ou doxologiques relatifs à la théologie trinitaire sont venus progressivement s’ajouter sur cette structure. Les évolutions successives de cette forme remaniée conduiront au texte définitif (VIème siècle) qui sera traduit en latin et qui est encore utilisé actuellement.
Que pouvons-nous dire du texte définitif de l’hymne angélique « Gloire à Dieu » ?
Nous allons terminer par mettre en perspective l’annexe précédemment proposée où se trouve une vision synoptique des différentes sources liturgiques avec le texte de l’hymne du « Gloire à Dieu ».
Déjà nous pouvons dire que l’Hymne du « Gloire à Dieu » au sein de la messe conserve la même synthèse structurelle provenant de l’ensemble des sources liturgiques, à savoir : louange, prière au Fils, acclamations.
La louange est identique au Codex Alexandrinus ainsi qu’à la « grande doxologie » de l’Eglise de Byzance. Cependant, il n’y a pas la mention du Saint-Esprit dont nous savons qu’il s’agit d’un ajout postérieur à la suite de l’arianisme. La louange s’adresse donc au Dieu unique, puis s’ouvre uniquement au Père et au Fils. D’une certaine manière cela atteste que nous sommes en présence d’une version primitive, proche de ses origines antiochiennes mais surtout du corpus johannique où l’hymne christologique mettait en lumière uniquement une relation de type « sacerdotal » entre le Père et le Fils. En glorifiant Dieu, nous entrons dans le mystère où le Père est glorifié en glorifiant son Fils
Les acclamations sont également identiques au Codex Alexandrinus ainsi qu’à la « grande doxologie » de l’Eglise de Byzance en ce qui concerne la personne du Fils. Cependant, comme pour la version de l’antiphonaire de Bangor, on y a ajouté une acclamation. Au lieu de « toi seul es glorieux » on a mis « toi seul est le Très-Haut » qui est une nouveauté unique au sein des différentes sources. Cependant la doxologie conclusive est identique à la version de l’antiphonaire de Bangor, c’est-à-dire complètement trinitaire. Notons au passage la seule mention de l’Esprit Saint qui unit le Fils à la Gloire de son Père. Cette unique mention atteste que l’hymne du « Gloire à Dieu », même dans sa version latine pour la messe, n’est pas une hymne à la Trinité mais bien une hymne christologique dans le parfait esprit de ces origines ! A ceci nous pouvons constater une sorte de compilation entre la reprise d’une souche antique avec un élément tardif que l’on va modifier en adjoignant un élément nouveau : il y a bien métissage !
En revanche, l’élément central qu’est la prière au Fils va nécessiter une attention spéciale, car la traduction en latin du texte grec a amené une modification structurelle de la versification qui s’adjoint d’une modification théologique. Autant la louange et les acclamations portent les vestiges antiques, presque archaïque de l’héritage antiochien, autant avec la prière au Fils il y a une authentique création. Ici la grammaire et la versification entraîne un changement théologique dont il faut prendre la mesure. Il faut pour cela observer les évolutions progressives. La souche la plus ancienne est bien sûr la version du Codex Alexandrinus constituée de deux versets (un pour l’introduction et la prière à l’Agneau de Dieu, un pour le Fils glorifié à la droite du Père). Au sein de la version de l’Eglise Byzantine, nous pouvons observer qu’il y a exactement le même texte que le Codex Alexandrinus hormis la suppression d’un « aie pitié de nous » qui renforce la désignation de celui qui « ôtes les péchés du monde ». Cependant on conserve toujours deux versets. Au moment de la traduction en latin, on peut constater que l’on semble avoir pris la version de l’Eglise Byzantine mais pour laquelle on a modifié la structure des versets. En effet nous sommes passés de deux versets à quatre versets. Ce qui va engendrer un changement litanique et surtout un changement de sens entraînant des conséquences christologiques !
Voici cette comparaison :
Prière au Christ / Version de l’Eglise Byzantine
Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, Fils du Père,
toi qui ôtes le péché du monde, aie pitié de nous, ô toi qui ôtes les péchés du monde
Reçois notre prière, ô toi qui sièges à la droite du Père, et aie pitié de nous.
Prière au Christ / Version de l’hymne angélique actuelle
Seigneur Dieu, Agneau de Dieu, le Fils du Père.
Toi qui enlèves les péchés du monde, prends pitié de nous.
Toi qui enlèves les péchés du monde, reçois notre prière.
Toi qui es assis à la droite du Père, prends pitié de nous.
Pour la version de l’Eglise Byzantine nous pouvons observer le premier verset divisé en deux parties avec une organisation ternaire, dont la structure en chiasme encadre le refrain litanique. C’est l’appel envers la Miséricorde de Dieu mais avec une accentuation sur la source : l’Agneau de Dieu. De même, le deuxième verset possède une organisation ternaire mettant au centre quant à lui le Fils glorifié auprès de son Père.
Cependant, pour la version latine de l’hymne, nous retrouvons les mêmes mots mais avec une versification et une structure grammaticale différente. On voit déjà apparaitre quatre versets où seul le premier conserve la structure ternaire. Les trois autres sont à présent binaires : antécédent/conséquent mettant en exergue la désinence « toi qui… » comme nouveau refrain litanique à cause de sa triple répétition. Cette reconfiguration décale l’attention du centre litanique qu’est la Miséricorde (aie pitié de nous) vers celui qui est la source de Miséricorde ! Par cette reconfiguration du refrain, nous retrouvons une litanie à l’Agneau de Dieu comme nous avions pu la remarquer originellement au sein du Codex Alexandrinus mais que la version Byzantine avait amoindrie !
Mais tout aussi paradoxale que cela puisse paraître, ce retour à une structure litanique antique désignant « l’Agneau de Dieu » devient en même temps la nouveauté de cette version de l’hymne, entraînant un changement théologique de taille ! En effet la période « toi qui enlève les péchés du monde », normalement en chiasme encadrant le refrain litanique « aie pitié de nous », est maintenant complètement dissocié de ce qui précède pour devenir un antécédent associé au conséquent « reçois notre prière ». Normalement ce dernier devrait être associé à « Toi qui sièges à la Droite du Père ». Or, en analysant le Codex Alexandrinus nous avions pu voir que celui qui « reçois les prières » n’est pas « l’Agneau de Dieu », mais le Fils glorifié à la Droite de son Père. C’est auprès de lui, dans la Gloire, que le Christ est perçu comme le « Grand-Prêtre » qui intercède en notre faveur. Or la modification engendrée par la traduction en latin du texte original grec fait que maintenant celui « qui enlève les péchés du monde » devient en plus celui qui « reçoit notre prière » ! Le changement est de taille car elle ramène la figure du « Grand-Prêtre » non plus au Fils glorifié à la Droite du Père, mais au Crucifié, à l’Agneau de Dieu ! Avec cette version c’est le Crucifié, qui sur la Croix, reçoit les prières et intercède pour nous auprès de son Père. Même si l’hymne garde la mention que le Fils est « assis à la Droite du Père », cette dernière n’est plus accentuée et en plus ne concerne plus du tout la réception de la prière comme au sein de l’héritage grec ! Il est d’autant plus étonnant de constater ce radical changement au sein de cette version latine de l’hymne du « Gloire à Dieu » pour la messe, alors que la version latine de l’hymne pour les Laudes au sein de l’antiphonaire de Bangor, pourtant plus tardif, conserve la structuration du texte grec original.
On constate un affaiblissement de la Glorification du Fils au détriment d’un renforcement de l’Agneau de Dieu ! Ce bouleversement christologique au sein de la prière au Fils semble reposer sur une certaine interprétation de la Lettre aux Hébreux dont il est indirectement question. On semble, en Occident déplacer le curseur sur la Rédemption au détriment de la Glorification. Cette différence herméneutique marque une rupture théologique fondamentale entre l’Occident et l’Orient, car même si cette version de l’hymne reprend des éléments antiques provenant de l’héritage antiochien, cette conception du « Christ Grand-Prêtre » associée à la figure du « Crucifié », à « l’Agneau de Dieu » ne relève pas de cet héritage. C’est pourquoi on peut considérer, qu’au-delà de la traduction en latin qui a reconfiguré les versets et la grammaire des mots provenant de la version de l’Eglise de Byzance, il y a en outre une authentique métissage culturel et théologique. D’où peut provenir un tel changement christologique ? Nous avions vu pour le Codex Alexandrinus et les Constitutions Apostoliques, l’influence scripturaire de la Lettre aux Hébreux et du corpus johannique. N’y-a-t-il pas, au-delà de ce changement christologique, une nouvelle interprétation de ces sources bibliques qui s’exprime à travers lui ?
Ainsi reconfigurée la prière au Fils, du fait de sa nouvelle structure, est résolument une litanie désignant l’Agneau de Dieu, non seulement perçu comme la source du Salut, mais en plus comme la figure du « Grand-Prêtre » ! A présent nous sommes loin de l’héritage grec d’Antioche où la prière au fils s’adressait de manière équilibrée à la fois à « l’Agneau de Dieu » puis au « Fils glorifié ». Cette désignation accentuée de celui « qui ôte les péchés du monde » confère à cette prière au Fils une dynamique pénitentielle en plus d’une certaine christologie où la Croix est non seulement un lieu théologique du Salut mais en même temps de l’intercession sacerdotale. N’est-ce pas déjà les signes d’un certain centralisme de la Croix que développera la théologie occidentale ? Il devient de plus en plus évident qu’une autre herméneutique de la Lettre aux Hébreux ainsi que de la Glorification du Fils selon l’évangile de Jean s’exprime à travers cette reconfiguration ! Ce travail mériterait d’être entrepris.
On peut alors légitimement se demander de quelle(s) influence(s), culturelle et théologique, provient ce métissage au moment de la traduction en latin de cette version de l’hymne pour la messe. On peut simplement remarquer que l’on retrouvera bien des harmoniques de ce bouleversement christologique avec ce que nous avons découvert en étudiant la version de l’hymne au sein de l’antiphonaire de Bangor influencé par le mouvement théologique des moines Irlandais qui marqua tant l’Eglise latine : à savoir cette accentuation pénitentielle très forte sur la source de la Miséricorde.
En tous cas, il est impressionnant de constater, comment en conservant la plupart des mots des sources antiques, on peut en modifier le sens à ce point. N’est-ce pas un autre aspect d’une tradition vivante où la continuité terminologique peut engendrer des discontinuités herméneutiques ?
Que pouvons-nous dire alors de l’hymne-litanie « Christ, le Fils du Père » ?
En reprenant le commentaire musical publié dans le revue Caecilia (04-2023), il nous est possible maintenant de voir au sein de quelle tradition se situe le jésuite et Maître de chapelle Bernard GEOFROY lorsqu’il composa le texte.
Avec sa dynamique pénitentielle liée au temps du carême très marquée, sa formule litanique centrée sur la pitié et la Miséricorde implorées, son christocentrisme très affirmé montrant un visage miséricordieux, nous sommes complètement dans cette tradition issue de la version de l’antiphonaire de Bangor, version latine où se rencontrent les souches primitives en grec (héritage antiochien) et le mouvement théologique et spirituel des moines Irlandais ! Nous sommes bien dans une tradition vivante de cette version latine de l’hymne du « Gloire à Dieu » pour les laudes !
Ainsi le jésuite Bernard GEOFFRAY, en écrivant son texte, s’est enraciné dans cette tradition théologique et spirituelle vivante. Son hymne-litanie, authentique création avec son métissage biblique intense pour proposer une litanie christologique centrée sur la Miséricorde et l’œuvre de Salut, semble s’inscrire dans tout ce que nous avons pu découvrir de l’étude de la « prière au Fils » au sein des différentes sources liturgiques.
A sa manière, à travers cette véritable litanie au Christ-Miséricordieux, Bernard GEOFFRAY nous permet de retrouver autrement, et de manière originale par le compendium biblique des invocations, une souche antique et vénérable de l’hymne du « Gloire à Dieu » : à savoir une prière christologique que les sources les plus anciennes exposent dans la « prière au Fils » et que les sources les plus récentes développent à travers les ajouts du cycle de versets. Son travail de synthèse biblique s’apparente au travail de ceux qui ont jadis sélectionné des versets de psaumes !
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QUELQUES CONSIDERATIONS POUR TERMINER
Si les études scientifiques récentes montrent que l’influence de la théologie d’Origène sur la rédaction de la « Grande doxologie » des Constitutions Apostoliques est bien antérieure à la crise arienne, on peut alors légitimement se demander pourquoi une telle modification ?
Déjà, ne justifierait-elle pas le fait que la souche originelle de l’hymne proviendrait justement d’Antioche ? Si la modification apportée par la rencontre avec la théologie d’Origène dépasse le cadre d’un simple ajout ou d’une simple omission, n’est-ce pas parce que le texte proviendrait de cette ville au passé prestigieux pour le christianisme naissant. On ne peut modifier de manière aussi importante et significative un texte que s’il y a déjà une tradition vivante et solidement ancré le concernant.
Si l’hymne a été composée vers le IIème siècle à Antioche, ville la plus importante de la chrétienté après Rome où les croyants ont reçu pour la première fois le nom de « chrétien [84]», nul doute qu’il a pu y évoluer ensuite pour que les Constitutions Apostoliques à la fin du IVème siècle puissent apporter le témoignage d’une influence ancienne avec la théologie de la prière d’Origène (IIIème siècle).
Mais pourquoi a-t-on modifié à ce point le texte, et surtout à Antioche, ? Est-ce uniquement parce que la ville fut le berceau de l’arianisme ? Ou peut-être parce que bien avant la crise arienne le statut de l’hymne était en train progressivement de changer ?
Si nous considérons l’acte du pape Télesphore (IIème siècle) faisant « entrer » en liturgie eucharistique pour la Nativité cette hymne christologique des laudes ; même si cela ne concerne que la liturgie du pape puis celle des évêques, nul doute que cela aura une influence progressive sur le statut de cette hymne. L’entrée en liturgie eucharistique va avoir des conséquences car chanter une « grande doxologie » au lever du soleil, le matin, n’est pas tout à fait la même chose que de l’insérer dans une action rituelle eucharistique. Les mots ne prennent pas la même signification suivant le contexte liturgique. Même chantée par le pape seul puis les évêques avant de prononcer l’oraison de collecte, la dynamique formée par cet ensemble rituel n’est pas la même qu’une doxologie au lever du soleil. Curieusement l’influence d’Origène rend davantage compte d’une logique de l’hymne associée en parallélisme à la dynamique interne d’une oraison. Puisque par nature l’oraison est adressée au Père, par le Fils considéré comme l’unique médiateur, remanier l’hymne dans cette même logique c’est manifester comme un lien intrinsèque et un processus d’unification avec la syntaxe d’une oraison ! Avec la version des Constitutions Apostoliques, la théologie de la prière prend résolument le pas sur l’hymne originelle. Or cette théologie de la prière d’Origène se retrouve parfaitement en adéquation avec la formulation syntaxique des oraisons. Ainsi le remaniement de l’hymne influencé par la théologie d’Origène la rapproche paradoxalement, comme dans le cadre de la liturgie eucharistique, de la théologie propre à la narration des oraisons ! Cette divergence n’était-elle pas le vestige d’une modification de l’hymne en fonction de son utilisation ? La version de la « grande doxologie » des Constitutions Apostoliques est donc plus proche d’une dynamique eucharistique que d’une prière matinale !
Or si l’Eglise orientale n’a jamais fait entrer cette hymne au sein de la liturgie eucharistique, l’Eglise occidentale l’a fait ! Ainsi l’entrée en liturgie eucharistique papale de cette hymne christologique au sein de l’Eglise occidentale a peut-être, par le fait de changer de statut, suscité un phénomène d’hybridation, de transformation. Les conséquences de l’entrée en liturgie de l’hymne seront, non seulement de changer le statut, mais surtout de voir progressivement émerger deux hymnes à partir de la même souche : une hymne pour l’office lors du lever du soleil, puis une hymne pour la messe.
C’est pourquoi les Constitutions apostoliques portent peut-être l’influence de ce changement : car pourquoi modifier le texte pour le faire correspondre à la théologie de la prière exprimée par la narration des oraisons, si ce n’est parce que l’hymne « entre » dans la liturgie papale ?
De fait, par son entrée dans la liturgie, un lien très étroit s’est progressivement installé entre le texte de l’hymne du « Gloire à Dieu » et l’oraison de collecte, car l’un conduit à l’autre. En louant Dieu, en priant le Fils pour qu’il intercède pour nous dans la Gloire de son Père, et en l’acclamant lui et les autres personnes de la Trinité, nous entrons déjà dans la logique, à la fois narrative et théologique, de l’oraison de collecte.
Emmanuel BOHLER
Chercheur-contractuel – MSH-Lorraine
Membre associé externe – Centre de recherche ECRITURES – Université de Lorraine
------------------------------------------------------------------------------------------------------------- [1] Michel Steinmetz, Le Gloire à Dieu, in : Caecilia 05-2005 [2] Jean-Marie Lustiger, La messe, Paris, Bayard éditions, 1988 [3] Ibid. VI, l’hymne du « gloire à Dieu », p.77-78 [4] Le liber Pontificalis est un catalogue chronologique de tous les papes et évêques de Rome. Sa rédaction s’étale entre le VIème et le IXème siècle. Or, pour les papes les plus antiques, le Liber Pontificalis reprend le catalogue libérien établit par le pape Damase (366-384), successeur du pape Libère (352-366) [5] Les sacramentaires grégoriens sont des livres liturgiques contenant les prières que l’on attribue à la réforme du pape Grégoire le Grand. Ils dateraient des VIIème et VIIIème siècle. [6] Rédigé vers 1085, il s’agit d’un long commentaire sur la liturgie papale qui deviendra un traité liturgique médiéval. Par lui, l’église allemande, comme l’église de Hongrie, ont pu unifier la liturgie dans tout l’Empire. [7] Les Constitutions apostoliques Tome III, Livres VII et VIII, Introduction, texte critique, traduction et notes de Marcel Metzger, SC 336, Paris, Cerf, 1987, p.113 [8] Les Constitutions apostoliques forment une source importante pour la liturgie, et en particulier la liturgie antiochienne. Par exemple le Livre II (qui est une libre reformulation de la Didascalie des apôtres composée vers 230) contient une Anaphore ainsi que la structure complète d’une messe qui ressemble à celle issue de la réforme du Concile Vatican II. Le Livre VII, basé sur la Didachè (document du christianisme primitif daté de la première moitié du Ier siècle ou début du IIème siècle) propose également une autre anaphore complète. Enfin le Livre VIII, dont les chapitre 3 à 46 sont rédigés sur la Tradition apostolique (traité du début du IIIème siècle rédigé par Hyppolite de Rome), nous fournit une liturgie complète considérée comme la plus ancienne connue et qui constitue la souche la plus ancienne de la Divine liturgie. [9] Jules Lebreton, « La forme primitive du Gloria in excelsis. Prière au Christ ou prière à Dieu le Père ? », in : Recherches de Science Religieuse 13-3 et 13-4, 1923, p. 322-329 [10] Bernard Capel (Dom), « Le texte du Gloria in excelsis », in : Revue d’Histoire Ecclésiastique 44, 1949, p. [11] Michel Steinmetz, Le Gloire à Dieu, in : Caecilia 05-2005 [12] L’original du texte grec a été trouvé in : Jules Lebreton, « La forme primitive du Gloria in excelsis. Prière au Christ ou prière à Dieu le Père ? », in : Recherches de Science Religieuse 13-3 et 13-4, 1923, p. 323 [13] Eugène Cardine, Vue d'ensemble sur le chant grégorien, Solesmes, Abbaye Saint-Pierre, 2002, p. 5 [14] Les Constitutions apostoliques Tome III, Livres VII et VIII, Introduction, texte critique, traduction et notes de Marcel Metzger, SC 336, Paris, Cerf, 1987, p.113 [15] Professeur émérite à la Faculté de Théologie Catholique de l’Université de Strasbourg et qui collabore à la revue Caecilia. [16] Les Constitutions apostoliques Tome III, Livres VII et VIII, Introduction, texte critique, traduction et notes de Marcel Metzger, SC 336, Paris, Cerf, 1987, p.113z [17] Lc 2,14 [18] Ps 112, 1-2 [19] He 4,14 [20] Jn 1,29 [21] Ps 79,2 [22] Les Constitutions apostoliques Tome II, Livres VII et VIII, Introduction, texte critique, traduction et notes de Marcel Metzger, n°200-238 SC 336, Paris, Cerf, 1987, p.113 [23] Ibid. n°215-238-353 [24] Blume, Der engelhymnus Gloria in excelsis Deo. Sein Ursprung und seine Entwicklung. Stimmen aus Maria-Laach, LXXIII-I, 1907, p.43-62. [25] Le Trisagion est une invocation que l’on répète trois fois comme une litanie. Le texte, lui aussi un des plus anciens du christianisme d’Orient dit : Saint Dieu, Saint Puissant, Saint Immortel, aie pitié de nous. Le texte s’inspire du chant des anges révélés au prophète Isaïe durant la première année du roi Ozias (Is 6,3). [26] David M. Masroberte, Citations for the Great Doxology, Text according to the Antiochian Orthodox Christian Archdiocese, janvier 2013 [27] Ap 7,12 [28] Gn 1,3-5 ; 2 Co 4,4 [29] Lc 2,14 [30] Ps 21 (22), 25 [31] Ps 102 (103), 1 [32] Ps 94 (95), 6 [33] Ps 115,1 ; Ps 113,9 [34] 1 Chr 29,13 [35] 2 Tm 4,18 [36] Ps 102 (103), 17-19 [37] Gn 17,1 [38] Jn 3,16-18 [39] 1 Co 8,6 [40] 1 Co 12,3 [41] 1 P 3,15 ; Ap 11,17 [42] Jn 1,29 ; Ap 15,3 [43] Jn 1,14 [44] Jn 1,29 [45] Ps 122 (123), 3 ; Lc 17,13 [46] 1 Jn 2,2 [47] Ps 4,1-2 [48] Mc 10,37 [49] Ps 122 (123), 3 ; Lc 17,13 [50] Ap 15,14 [51] 2 R 19,19 ; Is 37,20 ; 1 Co 12,3 [52] Ph 2,11 ; 2 Co 1,20 [53] Ps 144 (145), 2 (verset que l’on retrouve dans le Te Deum) [54] A partir de Rm 6, 12-23 (verset que l’on retrouve dans le Te Deum) [55] Dn 3,25 ; Dn 1, 29-30 [56] Ps 32 (33), 22 [57] Ps 118 (119), 12 [58] Ps 89 (90), 1 [59] Ps 40 (41), 4-5 [60] Ps 142 (143), 9-11 [61] Ps 35 (36), 9-10 [62] Ps 35 (36), 10-11 [63]Js 24,19 [64] Ps 44 (45), 3 [65] Ps 101 (102), 26-27 ; 1 Tm 1,17 [66] Ps 89 (90), 2-4 ; Lc 17,13 ; Mt 9,27 ; Mt 20,30-31 [67] Doxologie typique des ajouts par suite de la crise arienne pour réaffirmer la théologie trinitaire du Concile de Nicée et de Constantinople [68] Jn 1,14 [69] Jn 17 [70] Is 6,3 [71] Ap 19 [72] Antiphonaire copié vers 680 en Irlande. [73] Ps 144 (145), 2 (verset que l’on retrouve dans le Te Deum) [74] A partir de Rm 6,12-23 (verset que l’on retrouve dans le Te Deum) [75] Dn 3,25 ; Dn 1, 29-30 (verset alléluiatique pour le dimanche de la Trinité) [76] Ps 122 (123),3. Source narrative du refrain litanique « prends pitié de nous » [77] Ps 5,2-3 (Introït pour le samedi de la 3ème semaine de carême) [78] Ps 5,3-5 [79] Ps 87 (88),13-14 [80]Compilation d’un verset d’une hymne sur le temps de Bède le Vénérable et d’une antienne liturgique inspirée du Ps 122 (123),3 d’où provient le refrain litanique « prends pitié de nous » [81] Compilation d’une invocation liturgique que l’on retrouve dans le Canon Romain avec le refrain litanique « prends pitié de nous » [82] Compilation d’une invocation synthétisant les quatre premiers degrés de la Litanie des saints avec le refrain litanique « prends pitié de nous » [83] Compilation d’une invocation synthétisant les autres degrés de la Litanie des saints avec le refrain litanique « prends pitié de nous » [84] Ac 11,26
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