"Magnificat en canon" de Jacques BERTHIER (répertoire de Taizé)
- bohleremmanuel
- 18 mai 2021
- 3 min de lecture
Libre commentaire du célèbre "Magnificat en canon" du répertoire de Taizé
Cote : Ateliers et Presses de TAIZE Texte : Ecriture Sainte – Domaine public
Article publié par l’Union Sainte Cécile, dans la revue CAECILIA du Service Diocésain de Pastorale Liturgique et Sacramentelle, de musique et d’art sacré de l’archidiocèse de Strasbourg.
N°03, édition de mai 2021.
Le "Magnificat en canon" fait partie des emblèmes de Jacques Berthier mais aussi du lieu atypique qu'est Taizé en Bourgogne.
Dans l'article "Qui est Jacques BERTHIER, le compositeur des chants de TAIZE[1]" publié dans le journal La Croix le 28 juillet 2014, Daniel HAMELINE son parolier répondait en ces termes : « Taizé et ses rassemblements de jeunes, vont constituer pour Jacques Berthier un incomparable laboratoire musical. Il y teste un répertoire qui va gagner rapidement en notoriété internationale avec le rayonnement de Taizé. Par sa musique, il va contribuer à ce rayonnement : Taizé est en grande partie identifié à cette musique de la même façon que cette musique est identifiée avec Taizé. ».
Ce laboratoire est constitué par les singularités de cette "assemblée" : nombre important de fidèles, dimension cosmopolite et côté éphémère, originalité de l'espace. Le répertoire de Jacques Berthier pour Taizé est sans doute le plus beau témoignage d'un compositeur qui œuvre avant tout pour une assemblée mais qui tient compte d'un paramètre d'avant-garde propre à la musique contemporaine : la spatialisation. Une musique qui a pour vocation de prendre corps mais dans un espace à habiter entièrement.
Le répertoire de Taizé manifeste la grande culture musicale d'un homme qui a été solidement formé. Le père de Jacques Berthier, Paul Berthier (1884-1953) fut Maître de chapelle de la cathédrale d'Auxerre, formé à la Schola Cantorum dans la plus pure tradition du Motu Proprio[2] de Saint Pie X sur la musique sacrée promouvant le répertoire grégorien et les polyphonies de la Renaissance.
Alliant tradition et modernité, le style musical des compositions pour Taizé porte en lui les caractéristiques principales des polyphonies de la Renaissance, mais reconfigurées avec un esprit d'avant-garde en fonction de cette assemblée et de cet espace à habiter.
Le "magnificat en canon" est un modèle du genre. Il possède une richesse thématique constituée de 2 canons monodiques et 2 canons polyphoniques, tous divisés en 4 shèmes pouvant se superposer. Si nous voulons déployer la totalité des 4 canons nous aboutirions à une polyphonie à 40 voix, comme le fit jadis Johannes Ockeghem (1420-1497) avec son canon Deo Gratias à 36 voix, ou alors Thomas Talis (1505-1585) avec son célèbre Spem in Alium à 40 voix.
Comme à la Renaissance, l'extraordinaire euphonie due à la simplicité mélodique et au dépouillement harmonique, permet aux "voix" d'être interchangeables. Elles peuvent être chantées vocalement ou être supplées par un instrument.
Ainsi la partition des 4 canons est à "géométrie variable" : on peut répartir les lignes mélodiques en fonction des voix et des instrumentistes à disposition, de même répartir ces différents ensembles vocaux ou instrumentaux au sein l'espace à disposition.
Le plus difficile pour un canon étant de s'arrêter, vous trouverez en annexe numérique, une proposition de mise en œuvre à partir du canon à 13 voix Jesus autem transiens de Robert Wylkynson (1450-1515).
------------------------------------------------------------------------------------------------------------- [1] Article disponible sur le lien : https://croire.la-croix.com/Definitions/Priere/Chant-gregorien/Qui-est-le-compositeur-Jacques-Berthier [2] Le texte du Motu Proprio "Tra le sollicitudini" de saint Pie X, datant du 22 novembre 1903 est disponible sur le lien : https://www.introibo.fr/Tra-le-sollecitudini-1903. Texte commenté pour son centenaire par Jean-Yves Hameline dans un article : "Le Motu Proprio de Pie X et l'instruction sur la musique sacrée", In : La Maison-Dieu, 239, 2004/3, p.85-120 disponible par ce lien : http://www.liturgie-diocese-alsace.org/files/File/239_motu_proprio_de_pie_X.pdf.
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