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Bien tard je t’ai aimée, Ô beauté, si ancienne et toujours nouvelle


Commentaire d’évangile pour le 4ème dimanche de Carême  (Lc 15,1.3-11-32 ; année liturgique C), célébré le dimanche 31 mars 2025.


Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 31 mars 2025.




Ce célèbre adage des Confessions de saint Augustin pourrait être le cri, le chant intérieur des deux fils de la plus célèbre des paraboles lucaniennes, qui en cette année jubilaire, nous permet de franchir la Porte de l’Amour infinie de Dieu.

 

La beauté ?

Elle se manifeste par les deux témoignages d’Amour de ce Père envers ses deux fils. Un Amour qui n’est que don total. Tout d’abord il fait ce que l’on appellerait une avance sur héritage en donnant la moitié de son bien au plus jeune, et plus tard il redira à son aîné qu’il possède déjà tout ce qui lui appartient.

Bien évidemment, il y a ce banquet somptueux préparé à l’occasion du retour de son plus jeune fils, ruiné. Banquet somptueux en échange de la dilapidation de son fils cadet... Banquet somptueux en échange de la perte symbolique de la moitié de sa vie labeur ainsi sacrifiée par sa descendance... Si la prospérité est signe de la bénédiction de Dieu depuis la Genèse, le fils cadet dilapida d'une certaine manière le don de Dieu accordé à son Père, un peu comme Jacob usurpa à son père Isaac le droit d'ainesse de son frère aîné Esaü pour un plat de lentille (Gn 25,31-34)...


Face une telle indignité, la vraie fortune du Père se manifeste !

Et qu'elle est cette fortune que personne ne semble encore connaître ? Surtout lorsque l'on pense à ce précepte évangélique "là où est ton trésor là aussi sera ton coeur..." (Mt 9,19-21) Quelle est cette beauté cachée si ancienne et au fond toujours nouvelle, parce qu'insoupçonnée ? Au fond, ne pourrions-nous pas déjà proclamer, comme durant la nuit pascale, bienheureuse désinvolture d'un fils qui nous révéla l'Amour du Père !

La beauté de l’Amour n’est pas du registre de la fructuosité (ou pas) des biens matériels ! C’est ailleurs qu’il faut la chercher, au-delà de l’infortune et de la faillite, tout autant que de la prospérité et du travail.

Or cette beauté de l’Amour est bien à la fois ancienne et toujours nouvelle !

Ancienne parce qu’elle est là, présente, aux origines de cette narration.

Mais en même temps toujours nouvelle parce que les deux fils n’en prennent conscience qu’à la fin du récit... Le plus jeune à son retour d’exil, l’ainé à son retour du travail des champs. Le premier dans la désolation de la ruine, l’autre dans le labeur de la réussite.


Finalement les deux fils pouvaient-il voir la beauté de cet Amour ?

D’après leurs réactions, le plus jeune ne voyait qu’une fortune à dilapider pour jouir de l’existence tandis que l’autre ne voyait qu’un bien à faire davantage fructifier. Entre l’excès et l’avarice, entre le désordre et la dureté de cœur, les deux fils étaient comme des aveugles : l’Amour était bien-là, tout près d’eux, mais ils ne le voyaient pas !

Au fond c’est bien tard, à la fin de l’évangile, comme les ouvriers de la dernière heure (Mt 20), que les yeux ouvrent et qu’ils peuvent enfin se laisser aimer, de cet Amour éternel et toujours jaillissant, qui va totalement les recréer, les engendrer, l'un comme l'autre !



Les deux fils vivent un passage, une Pâques pour aimer cette Beauté si ancienne toujours nouvelle : celle de l’Amour Miséricordieux !

 

Pour le plus jeune, son voyage est une traversée du désert, un exode où voulant retourner à ses origines, il est comparable au peuple qui jadis voulait retourner en Egypte, préférant ne pas avoir faim plutôt que d’être libre (Nb 11,5-6). Bien sûr il a un repentir mais c'est encore le repentir du ventre, pour retrouver une zone de confort. Or le Père lui révèle quelque chose de neuf, un don plus grand encore ! Il lui fait comprendre qu’en revenant à ses origines, il ne revient pas en arrière, comme en Egypte, mais plutôt il arrive vers une nouvelle Terre Promise ! Le Banquet en est la preuve, révélant que le don de la Terre Promise prépare un don plus grand encore : l’Amour miséricordieux !

Pour l’aîné, son voyage au champ est comparable également à l’entrée dans la Terre Promise. Moïse y donna des recommandations comme : Si ton frère tombe dans la pauvreté et sous ta dépendance, tu le soutiendras comme s’il était un immigré ou un hôte, et il vivra avec toi (Lv 25,35). Or le frère ainé semble vouloir désobéir aux principes élémentaires qui fondent l’année jubilaire demandée par Moïse (Lv 25,11-41). En le faisant participer au Banquet, le Père invite son fils ainé à revenir sous la Loi et à pratiquer, comme il le fait, la Miséricorde à travers le rachat.

Or n'est-ce pas le Christ qui libère de la servitude et de l'esclavage du péché (Ga 5,1) ? N'est-ce pas lui qui nous rachète à grand prix (Tt 2,14) ? Ainsi le Banquet annoncé dans la parabole n'est autre que celui où le Christ se donne lui-même en nourriture (Office du Saint-Sacrement de saint Thomas d'Aquin) !

Par cet évangile, les deux fils vivent une authentique libération par l'Amour, avec l'Amour, dans l'Amour ! En ce sens nous sommes bien dans la Grâce d’un Jubilé !

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