Benoît XVI et le mystère de la Charité

Voici un article publié dans le Revue officielle du diocèse de Metz: "Eglise de Metz", au sein de l'édition de juin 2013.

Renonciation de Benoît XVI, le 11 février 2013

Benoît XVI a planté des racines tellement profondes qu’il faudra être patient pour en voir les fruits évangéliques!

Et pourtant, il semble évident qu’il aura été le pape de la Charité tant dans sa présentation théologale, que son expression concrète à la fois dans la structure même de la vie ecclésiale et dans le contexte de mondialisation économique qui est le nôtre.

Curieusement, cet axe de la Charité est tellement enraciné dans les huit années de son Pontificat qu’il est parfois assez complexe d’en percevoir toutes les liens.

C'est au cours d'une des audiences générales, le 26 novembre 2008 que Benoît XVI semble exprimer le mieux une problématique majeure de son Pontificat. Il dit ceci:

"…Les conséquences d'une foi qui ne s'incarne pas dans l'amour sont désastreuses, car elle se réduit à l'arbitraire et au subjectivisme le plus nuisible pour nous et pour nos frères. Au contraire, en suivant saint Paul, nous devons prendre une conscience renouvelée du fait que, précisément parce que nous sommes justifiés dans le Christ, nous ne nous appartenons plus, mais nous sommes devenus le temple de l'Esprit et nous sommes donc appelés à glorifier Dieu dans notre corps avec toute notre existence (cf. 1 Co 6, 19)…A quoi se réduirait une liturgie adressée uniquement au Seigneur, sans devenir, dans le même temps, un service pour nos frères, une foi qui ne s'exprimerait pas dans la charité?... »

Ainsi Benoît XVI, tout en ayant conscience avant même d'être élu des difficultés d'unité dans l'Eglise, comparée à "une barque qui prend l'eau de toutes parts" et parfois prise aux pièges de bien des séductions de pouvoirs et de conflits d'intérêts ; a en même temps une conscience de sa vocation d'être au service de l'unité de la foi. Avec l'enseignement de saint Paul, il semble fonder l'unité dans la foi, dans son rapport avec l'exercice de la charité.

D'ailleurs il a écrit sa première encyclique "DEUS CARITAS EST" le 25 décembre 2005, sur la médiation théologique et biblique de ce que peut être la "charité" et "l'amour chrétien". L'amour dans son lien avec la foi.

Puis il proposa une autre encyclique "CARITAS IN VERITATE" le 29 juin 2009, sur l'exercice concret de la Charité pour le développement intégral de l’être humain en tenant compte des réalités socio-économiques de la mondialisation.

Et enfin, il a signé un motu proprio, passé malheureusement complètement sous silence, daté du 11 novembre 2012 concernant le Service de la Charité "Intima ecclesiae natura". Ce motu proprio est une modification du Code de Droit Canonique pour être mieux en conformité avec l'enseignement de l'encyclique "DEUS CARITAS EST".

Il veut permettre à l'Eglise d'exercer encore mieux, selon le Droit, sa vocation à la Charité. La Charité devient alors encore plus constitutive de la vie ecclésiale.

Cette structure de sens entre ces 3 textes majeurs manifeste la problématique et la volonté de Benoît XVI d'enraciner davantage l'Eglise dans ce mystère de la Charité.

Cette volonté se trouve très clairement exprimée dans le discours des voeux qu'il a adressé à la Curie Romaine le 21 décembre 2007. Il disait que face à l'urgence des questions humaines et sociétales, il fallait s'enraciner en Christ pour témoigner de sa Charité.

l'Eglise sera "communion" dans la mesure où elle est « fondée dans la Charité".

Ne sommes-nous pas en présence d’une pensée qui semble prendre sa source dans la liturgie du Jeudi Saint ? Où dans le mémoriel de l’Institution de la Cène, nous contemplons l’union intime entre le pain eucharistique et le service fraternel.

Le geste de l’offrande eucharistique et le geste fraternel deviennent alors Epiphanie de l’Amour de Dieu !

En huit années, Benoît XVI nous aura livré une contemplation raisonnée de ce mystère qui révèle le coeur de Dieu, qui donne sens à l'action humaniste de l'Eglise dans le monde, et qui manifeste concrètement une éthique de la vie ecclésiale.

Benoît XVI lave les pieds de ses diocésains