L’Evangile des extrêmes !
- bohleremmanuel
- 1 déc. 2020
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile (Lc 16, 19-31) pour le 22ème Dimanche du Temps Ordinaire (année liturgique C), célébrée cette année le dimanche 25 septembre 2016.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire l’AMI HEBDO, au sein de l'édition du 23 septembre 2016.

vitraux de la cathédrale de Bourges (XIIIème siècle)
Tout comme l’exclamation paulinienne aux Corinthiens, dans cet Evangile Dieu choisit ce qui est faible pour confondre ce qui est fort.
Toute la construction narrative de cette parabole joue sur le fossé qui sépare les deux personnes.
Déjà parce que l’un est riche et l’autre pauvre.
L’un est anonyme, l’autre a un nom.
L’un est vêtu, l’autre semble nu, mettant l’accent sur ses ulcères comparables à une couverture.
L’un mange somptueusement, l’autre tout comme le fils prodigue, aimerait se rassasier de restes. Mais personne ne le remarque sauf les chiens. Pauvre Lazare dont la condition est en dessous d’une bête.
Par contre, l’un est enterré et l’autre monte directement au ciel porté par les anges.
L’un descend dans la terre d’où il a été tiré, l’autre porté par les anges est comparable à l’inconnu du psaume 90 (91).
Lazare est celui qui se tient à l’abri du Très Haut et repose à l’ombre du puissant. Ne serait-il pas le visage du Messie que l’on attendait ?
L’un est torturé, l’autre est directement dans le sein d’Abraham !
Quelle assomption pour celui dont personne ne se souciait sauf quelques chiens en guise de compassion.
Mais c’est alors que le riche prend la parole.
Chacune de ses trois interventions méritent que l’on s’y attarde tant les échos bibliques sont pertinent…
Tout d’abord il demande de l’eau pour rafraîchir sa langue.
Cette métaphore semble être une allusion au psaume 41 (42) qui manifeste ce désir de Dieu chez l’homme.
Ce dernier, comparé au cerf, est assoiffé et se languie de la présence de Dieu. Mais c’est également une métaphore qui évoque ce désir du don de l’Esprit.
En sommes, le riche demande à Lazare d’être comparable à l’envoyé de Dieu, au Messie, à l’oint de Dieu. Quelque part, l’homme riche reconnait dans sa mort que celui qui était pauvre à sa porte et qu’il n’avait jamais remarqué, était l’envoyé de Dieu. Dieu était présent dans le pauvre mais personne ne l’avait vu, tout comme jadis Jacob reconnu que Dieu était présent mais qu’il ne savait pas (Gn 28,16). Le visage du pauvre devient ce lieu où Dieu manifeste son propre visage.
Ensuite, le riche demande de manière encore plus explicite que Lazare devienne l’envoyé de Dieu, afin d’appeler le reste de sa famille à la conversion. Face à la réponse d’Abraham les renvoyant à l’Ecriture, la famille de cet homme riche est comparable à ce que Jésus avait dit de Jérusalem (Lc 13,34) lorsque cette dernière tue les prophètes qui lui sont envoyés.
Ici le pauvre Lazare était l’envoyé de Dieu, que la famille de ce riche refusa d’accueillir. Par l’abandon de cet homme, elle a méprisé et tué le prophète qui lui était envoyé, travestissant la propre expérience d’Abraham (Gn 18) qui, au chêne de Mambré, accueilla Dieu à travers le visage de ces voyageurs inconnus. Dans le visage du pauvre Lazare s’accomplissait les Ecritures où Dieu venait visiter son peuple. A travers l’appel de ce malheureux, c’était Dieu qui frappait à la porte et qui voulait entrer chez les hommes pour y faire sa demeure (Ap 3,20). Face à cette visitation, la famille de ce riche est restée aveugle et sourde.
Enfin la dernière réplique parle de la résurrection. L’autorité d’Abraham révèle qu’elle est l’accomplissement des Ecritures, et que sans les comprendre on ne peut saisir cet évènement fondateur.
Nous pouvons alors saisir que derrière le visage de Lazare c’était Jésus-Christ lui-même qui se révèle. Et qu’à travers le visage de chaque personne qui souffre, c’est Lui que l’on peut rencontrer (Mt 25,37)!
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