Vocalises spirituelles !
- bohleremmanuel
- 10 déc. 2020
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile (Lc 18, 1-8) pour le 29ème Dimanche du Temps Ordinaire (année liturgique C), célébrée cette année le dimanche 20 octobre 2019.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire l’AMI HEBDO, au sein de l'édition du 18 octobre 2019.

La lecture continue de l’Evangile nous amène à découvrir d’autres visages singuliers et incontournables de la tradition de l’Ecriture, authentiques métaphores de l’œuvre de Dieu dans l’histoire.
Dimanche dernier nous pouvions contempler la figure du lépreux à travers Naaman (2 R 5, 14-17), dont le processus de purification composé de l’intervention de 7 personnages, est comparable à une montée spirituelle.
Aujourd’hui nous pouvons contempler la figure de la veuve et du Juge.
Autant la lèpre est la métaphore du péché et le lépreux celui de l’homme pécheur, autant sa guérison manifeste l’œuvre du Miséricorde de Dieu.
A travers la figure de la veuve et du Juge nous retrouvons subtilement caché le lien entre prière et pratique de la justice ; entre prière psalmique qui n’est plus qu’un cri adressé, et la pratique d’une justice qui hélas est corrompue.
L’évangéliste utilise volontiers un ton polémiste car présenter la figure du Juge sans crainte de Dieu et ouvertement fermé au sort de son prochain, c’est travestir une noble institution, plus ancienne que la royauté d’Israël !
Bien avant la figure du Roi qui en Salomon trouve un modèle de justesse et de pondération pour discerner et bien gouverner (1 R 3, 9), la caste des Juges (Dt 1,9 et Dt 16, 18-20) avait été instituée pour non seulement rendre la justice mais faire ce lien avec la recherche spirituelle.
Les Juges étaient la prolongation dans le temps de la mission accomplie jadis pour Moïse, qui de ses bras étendus devaient intercéder et défendre son peuple (Ex 17, 8-13).
Rechercher la Volonté de Dieu et l’accomplir c’est faire ce qui est « juste et bon ». Or ce Juge n’est plus « juste » car il ne craint plus Dieu. Il n’est plus « bon » car son cœur est sourd aux appels de cette veuve. S’il décide de faire œuvre de justice ce n’est pas pour accomplir la Volonté de Dieu qui lui a demandé d’aimer son prochain (Dt 6) en toutes circonstances: c’est uniquement pour avoir la paix et la tranquillité !
Quel travestissement, mais également quel état de délabrement et de décadence spirituelle !
Ce Juge passe pour un clown de l’Ecriture !
Bref l’irrévérence caricature est à son comble.
Quant à la figure de la veuve, elle est présentée comme l’authentique prière selon le Livre des psaumes : « Mon cœur et ma chair sont un cri vers le Dieu vivant » (Ps 83, 3)…. « Seigneur, entends ma prière, que mon cri parvienne jusqu’à toi » (Ps 101, 2)… « Ecoute mon appel quand je cris vers toi » (Ps 140,02).
D’ailleurs le psaume 140 met en scène un juste qui pourrait nous aider à comprendre cette parabole. Le psalmiste utilise l’image des parfums pour associer prière (encens qui s’élève avec la prière) et pratique de la justice. Mais ce dernier est aussi l’image de la tentation et de la corruption « Que leurs parfums, ni leurs poisons, ne touchent ma tête ! Ils font du mal ».
Ce psaume trouve son accomplissement total dans le mystère de la Croix du Seigneur où le bois est devenu l’Autel et le Corps de Jésus le parfum qui brûle en offrande pour se répandre sur le monde.
Et pour nous ?
Qu’est-ce qui brûle et se consume sur l’Autel de notre cœur, où Dieu nous donne rendez-vous comme jadis à l’autel des parfums de la Tente du rendez-vous (Ex 40, 18-38) ?
Est-ce l’encens de la prière et de la justice ?
Ou bien le parfum de la corruption ?

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