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Mémorial ! Vous avez dit Mémorial ?


Commentaire d’évangile pour le dimanche du Très Saint-Sacrement  (Lc 9, 11b-17 ; année liturgique C), célébré le dimanche 22 juin 2025.


Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 22 juin 2025.


Illustration : « La multiplication des pains », Auteur anonyme, Ecole italienne du XVIIème siècle
Illustration : « La multiplication des pains », Auteur anonyme, Ecole italienne du XVIIème siècle


Si Blaise Pascal écrivit son célèbre Mémorial durant cette nuit de feu du 23 au 24

novembre 1654, il n’en demeure pas moins que les apôtres connurent aussi une

expérience de feu dans ce désert où Jésus les initie à son Mémorial.


Le récit de la multiplication selon saint Luc a une valeur initiatique : Jésus semble déjà

apprendre aux apôtres à perpétuer l’exemple qu’il leur laissera à l’heure de sa Pâque et

qui deviendra le Trésor le plus précieux de l’Eglise, autant sa pierre angulaire que sa

source : le mémorial de son Corps livré et de son Sang versé. Mémorial de sa Passion où

la gloire de la vie éternelle nous est déjà donnée.

Les apôtres seront initiés à perpétuer un geste qui deviendra central puisque Jésus leur demande explicitement de donner à manger cette foule. En effet il a enseigné et a guéri toute la journée, il est normal, après le labeur d’une journée, au moment où le jour commence à baisser, que chacun rentre chez soi. Pourtant Jésus insiste pour que cette foule soit nourrie par les apôtres qui prendront la tenue de service (Lc 22,27), comme s’il y avait un lien entre son enseignement et ses guérisons, avec la nourriture. Mais de quelle nourriture s’agit-il alors ?


Pour chercher à comprendre, nous pourrions peut-être utiliser la gématria, cette forme

d'exégèse propre à la Bible hébraïque dans laquelle on interprète des valeurs numériques.

Au lieu de céder au penchant tellement actuel de l’ésotérisme et de la magie, dans la Bible

les chiffres ont uniquement pour fonction de donner du sens.

Est-ce que les nombres du récit de la multiplication des pains nous aideraient à comprendre. ? Tentons de le mettre en équation. Le récit nous dit que la foule compte 5000 personnes. Pour être nourrie elle doit être divisée par les apôtres en groupe de 50 personnes, comme Jadis Moïse divisa le peuple pour instituer les chefs qui devaient l’aider dans sa mission (Ex 18,21) et qui seront consacrés dans le feu de l’Esprit (Nbr 11,11-17).

Nous avons donc cent groupes de cinquante personnes, c’est-à- dire : 50 x (50+50). Le nombre 50 semble subtilement être au cœur et mystérieusement caché. Or, il s’agit du nombre par excellence de l’Ancien testament qui évoque la libération (cinquante jours entre Pâques et Pentecôte en Ex 19) et le jubilé (tous les cinquante ans en Ex 19,13 et Lv 25,10-11). L’évangile de Luc prend régulièrement appui sur le prophète Isaïe, véritable chantre de cette « année de grâce et de bienfaits annoncée par le Seigneur » (Is 61,2) qu’est le jubilé ! D’ailleurs chez Luc, l’inauguration du ministère de Jésus (Lc 4,18) est présentée comme un jubilé (Is 61), mais extraordinaire !

Ainsi, il y a un lien très subtil qui s’opère entre la multiplication des pains, l’Eucharistie et la grâce d’une libération jubilaire ! D'ailleurs, selon saint Luc, n'est-ce pas au moment ultime où Jésus meurt sur la Croix que la Grâce d'une libération est accordée au bon larron (Lc 23, 32-43) ? Celui qui est prisonnier de la mort sera libéré pour entrer au Paradis, la nouvelle Terre Promise (Gn 12,1-3 ; Dt 9,1) où coulent le lait et le miel (Dt 31,20; Lv 20,24), cette abondance divine de la consolation (1 Co 3,2-3) !


Si Jésus a enseigné le Royaume et guéri des malades en les libérant de leur maux physiques, la multiplication des pains semble en annoncer la source. En préfigurant le récit de l’institution de la Cène (Lc 22,7-30), ce récit annonce la grâce d’une libération, d’où

l’insistance pour que les apôtres nourrissent cette foule ! Ce n’est pas simplement la

surabondance des douze paniers remplis à partir de la fraction de cinq pains et de deux

poissons qui va nourrir cette foule, mais la grâce d’une libération ! C'est un peu comme si la foule recevait déjà, par anticipation, ce qui sera pleinement donné au moment où Jésus "ayant aimé les siens, les aimera jusqu'au bout" (Jn 13, 1-15) en devenant l'Agneau de la Pâque nouvelle et éternelle.

Chaque dimanche ordinaire devient le lieu où se perpétue une grâce extraordinaire. Par son corps livré, par son sang versé, Jésus nous libère de nos servitudes et fait de nous des hommes et femmes libres pour aimer comme Lui !



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