Un Noël jaune ? Pourquoi riez-vous?
- bohleremmanuel
- 10 déc. 2020
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile (Mt 11, 2-11) pour le 3ème Dimanche du Temps de l'Avent (année liturgique A), célébrée cette année le dimanche 15 décembre 2019.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO, au sein de l'édition du 13 décembre 2019.

Le 3ème dimanche de l’avent dit de gaudete, est un vibrant appel à la joie. L’évangile a de quoi faire « rire jaune » bien des prétendants.
Suivons ce texte qui a une authentique valeur de purification pour préparer en nos cœurs l’écrin où sera déposée la joie de la Nativité.
Déjà il y a une crise :
Jean-Baptiste, cet homme aux foules (Mc 1, 7-8 et Lc 3, 3-4) ; celui dont la parole de feu avait de quoi nous glacer le sang (Jn 1, 19-28).
Celui qu’aimait entendre Hérode même s’il dénonçait ouvertement son inconduite (Mc 6, 17-29), est en prison.
Jean-Baptiste incarne la vision du prophète selon le Livre du Deutéronome (Dt 18, 15-18).
Pour démobiliser un mouvement qui prend de l’importance, autant s’en prendre au chef.
Nul doute que le martyr de Jean-Baptiste devait arranger les intérêts du pouvoir Hérodien corrompu.
Puis on vient à Jésus pour lui adresser une curieuse requête : est-il le Messie ?
Autrement dit, es-tu le libérateur ?
Si Jean-Baptiste a entendu parler des œuvres de Jésus, il lui est légitime de se demander pourquoi il ne ferait rien pour lui qui est prisonnier.
Après tout, il a annoncé sa venue en prenant appui sur les prophéties du livre d’Isaïe (Is 35, 1-10 ; 49, 9 ; 61,1) concernant la figure du Messie.
Il sait très bien qu’il devra proclamer la délivrance aux prisonniers.
Si Jésus est le Messie, pourquoi celui qui lui a préparé le chemin devrait-il rester en prison ?
La réponse de Jésus a de quoi faire « rire jaune » Jean-Baptiste.
D’abord Jésus cite Is 29, 17-19. Bien que reprenant les grandes idées de la figure du Messie, le contexte est différent : « Parce que ce peuple s’approche de moi en me glorifiant de la bouche et des lèvres, alors que son cœur est loin de moi (…) Malheur ! Dans un profond secret, loin du Seigneur ils cachent leur projet, et leur ouvrage est fait dans l’obscurité (…) C’est le monde à l’envers ! L’argile se prend-elle pour le potier ? » (Is 29, 13-16).
L’évangile ne travestirait-elle pas la figure du Précurseur en y suggérant une intention cachée?
Bien qu’ayant accompli sa mission, dans l’obscurité de sa prison, ne lui est-il pas arrivé de se prendre pour le Messie ?
Or être le Précurseur présuppose être un ascète.
Jésus fera l’éloge de son dépouillement car si les foules venaient ce n’était pas pour le clinquant de ses apparats extérieurs.
Mais son ascèse extérieure était-elle intérieure ?
Oui par sa fidélité à l’Ecriture.
Mais l’évangile laisse transparaître qu’au lieu d’être de l’argile, fragile, façonnée par la Grâce; le plus grande des prophètes se prendrait pour le potier… Raison pour laquelle il sera le plus petit dans le Royaume.
Bien de pieux palabreurs enroberont cela comment étant de l’impatience de la part du Baptiste, mais l’Ecriture nous suggère une attitude moins policée.
Or on ne peut vivre l’expérience du désert sans se dépouiller de sa volonté propre pour faire grandir l’humilité !
A travers les ombres et lumières de la figure du Baptiste, l’Evangile semble être un plaidoyer en faveur de l’ascèse.
Ce qui a une époque de surconsommation et de questionnement climatique est une grâce à entendre[1]!
Noël : c’est d’un désert que jaillira la joie parfaite !
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[1] Cette phrase a été censurée par le comité de rédaction de l’Ami Hebdo lors de la publication. Par honnêteté pour l’esprit du commentaire, et pour ne pas atténuer notre propos nous la laisserons.
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