Au milieu des extrêmes, une solitude et un silence abyssal !
- bohleremmanuel
- 15 déc. 2020
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile (Mt 26, 14 – 27, 66) pour le Dimanche des Rameaux et de la Passion (année liturgique A), célébrée cette année le dimanche 5 avril 2020.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO, au sein de l'édition du 3 avril 2020.

« Pape François face au crucifix » (2020) , Jean-Joseph CHEVALIER
La crise pandémique oblige à un confinement liturgique inédit.
Plus que jamais le paradoxe inhérent de la Semaine Sainte n’a été aussi pertinent!
Les récits de la Résurrection semblent bien anecdotiques face à la taille, à la construction et la solidité des quatre récits de la Passion.
Ce sont eux qui incarnent ce carrefour où viennent converger tous les écrits de l’Ancienne Alliance (Lc 24, 25-27 et 45-46).
Il est difficile de prendre encore la mesure de ce que nous vivons,
mais nous touchons des extrêmes entre des gens surexposés et des gens confinés.
Extrême entre ceux qui sont physiquement à bout tant ils sont sollicités et ceux qui sont nerveusement à bout parce que le confinement les isole au mieux avec les relations sans contacts du télétravail, ou pire à l’ennui et à tourner en rond.
Dans l’un et l’autre cas, il n’est pas facile de vivre dans un espace aussi restreint.
Pour les uns c’est le lieu de leurs actions pour les malades ou pour les nombreuses nécessités du quotidien.
Pour les autres c’est le lieu d’habitation.
Mais de généreuses initiatives jaillissent de ces conditions extrêmes !
Mais où est donc la liberté lorsque tout semble lié…
Pour les uns ? Liés aux malades dans des salles de réanimations et des hôpitaux de plus en plus surchargés, ou alors aux autres lieux de nécessités… Plus encore pour certains qui sont liés à la lourde responsabilité d’opérer des choix pour le traitement des malades en cas de situation de saturation…
Pour les autres ? Liés à l’obligation de ne pouvoir rien faire, enfermés à la maison.
Dans l’un et l’autre cas se manifeste une forme de solitude tout aussi pesante qu’insupportable.
Comme Jésus à Gethsémani (Mt 26, 30-46), chacun est plus que jamais seul face à sa réalité. Jamais le vide n’a été aussi insoutenable !
Comme Jésus en Croix (Mt 27, 32-56), chacun semble alors désarmé, dépossédé, dépouillé…
Alors avec une sourde violence semble monter de nos profondeurs un cri (Ps 129): le désir d’une libération (Ex 3, 1-7)!
Libération de ces espaces restreints pour pouvoir respirer ce vent de printemps, dont la diminution de pollutions nous permet d’en reconnaitre distinctement les saveurs et les richesses.
Libération de ce fichu virus, dont la violence vous prend par surprise et vous enlève votre élan vital : il accomplit une œuvre de mort !
Libération de cette autre violence : celle de la mort même!
Ceux qui sont surexposés la voient partout à l’œuvre à cause des ravages de ce virus.
Ceux qui sont confinés ne peuvent même plus voir leurs morts dont on ne peut plus faire mémoire pour les accompagner avec dignité jusqu’à leur dernière demeure.
Sans compter nos malades extrêmes et nos personnes fragiles que l’on ne peut plus visiter. Jamais la mort n’a accompli son œuvre avec autant de visibilité tout en étant aussi invisible ! Jamais sa présence n’a été aussi insupportable car elle devient un obstacle à l’expression de toute tendresse!
Sur ce chemin de ténèbres, les récits de la Passion vont résonner avec une force inouïe. D’eux vont jaillir une espérance (2 Co 5, 1-10).
Sur ce chemin de ténèbres brille déjà la lumière d’une libération (Ex 14, 21-27).
Le Christ vainqueur nous précède et nous devance. N’ayons pas honte de célébrer avec foi et espérance et de croire à un tel mystère de Charité: celui de Pâques.
Oui « L’amour jamais ne passera » (1 Co 13, 1-13)
Comentários