Comment tenir sous son regard?
- bohleremmanuel
- 23 nov. 2020
- 3 min de lecture
Libre commentaire de l’Evangile pour le dimanche 24 novembre 2013: Solennité du Christ-Roi de l'Univers (Lc 23, 35-43). Rédigé pour le journal hebdomadaire « L'Ami-Hebdo » au sein de l’édition du 22 novembre 2013.

A l’invitation du premier verset de ce dimanche, nous sommes ce peuple qui reste là, à regarder.
Imaginez que nous sommes dans le secret de notre chambre… Une croix et le crucifié sont là sous nos yeux… Nous restons là regarder… Que se passe-t-il en notre cœur ?
Se passe-t-il la même chose que dans celui des chefs des prêtres et des pharisiens ? Par leur ironie, ils commettent une impiété : Jésus est-il le vrai Fils du « Tout-Puissant » ? Ils mettent sa divinité à l’épreuve car il reste en croix, alors que pour d’autres, il a accompli des merveilles. SI Dieu est « Tout-puissant » peut-il permettre cela ?
Se passe-t-il la même chose que dans celui des soldats, qui par modeste charité pour le supplicié, vont lui donner cet anesthésiant léger qu’est la boisson vinaigrée ? Si dans la foi ils ne reconnaissent pas Jésus comme le Messie, ils mettent sa capacité humaine à l’épreuve. Humainement a-t-il l’étoffe du Héros ? D’un « Hercule évangélique » ? S’il est Roi, alors il doit être tout-puissant et dominer tous les autres, sinon il n’est pas digne de l’être.
Se passe-t-il la même chose que dans celui du premier malfaiteur ? Il veut bien croire mais, comme Thomas, il attend la preuve. Si Jésus se sauve à ce moment-là, il croira et sera sauvé. Or sur la Croix Jésus ira jusqu’à au bout… Pas de miracle spectaculaire, pas de retour en arrière, mais la mort et l’échec. C’est l’antithèse de la preuve !
En sommes nous avons tous les arguments pour ne pas tenir sous le regard du crucifié. Dieu semble ne pas être « Tout-Puissant », et Jésus n’est pas un nouvel Hercule. Pas de preuves pour devenir fanatique, mais l’absurde. Bref, trois raisons pour enlever les croix de nos murs et ne plus regarder en face cette réalité, qui au lieu d’affermir notre foi, la rendrait plus fragile et douteuse.
Or la progression des questions posées à Jésus par ces trois groupes de personnages est riche : Le 1er groupe demande dans l’ordre : il en a sauvé, qu’il se sauve lui-même. Le 2ème demande qu’il se sauve lui-même. Le 3ème, qu’il se sauve lui-même, et qu’il en sauve d’autres. La Croix devient un lieu central, déterminent, une jonction entre l’Ancienne et la Nouvelle Alliance : le lieu du Salut.
Par trois fois on tente Jésus de se sauver par lui-même, exprimant l’antique péché des origines, celui d’Adam : être la source de son propre salut, paroxysme de l’orgueil contemporain auquel il ne cède pas. Avoir la foi ne veut pas dire avoir une force herculienne. L’exemple nous vient du bon larron. Il est cloué sur une croix ne pouvant plus rien prouver par lui-même. Il se sait pêcheur et assume la conséquence de ses actes passés. Mais il dit par ses lèvres que le Seigneur ressuscitera, et il lui demande juste un souvenir. Il ne demande pas un exploit titanesque en sa faveur, mais un mémorial.
En regardant Jésus crucifié, il croit qu’il ressuscitera. Jésus lui révèle alors que même s’il n’est pas encore passé par la mort, la résurrection est déjà à l’oeuvre dans sa vie. Dans sa plus grande fragilité, bloqué par la montagne de son péché, sa confession et sa foi lui valurent ce miracle dès ici-bas.
Le paradoxe de la Croix est que la « Toute Puissance » de Dieu, son Amour miséricordieux, se révèle dans la plus grande fragilité. Autre paradoxe : devant le crucifié, on confesse la Résurrection ! La Croix devient un « signe » incontournable : source de notre salut et de notre foi, que l’on peut non seulement regarder, mais qui peut nous conduire à l’adoration. Alors tenons ferme sous son regard !
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