"Humble servante du Seigneur" de Jacques BERTHIER

Cet article a été publié au sein de « Eglise de Metz », la revue officielle du diocèse de Metz, dans l’édition de juillet-août 2007. Il correspond à l'encart "Saint Chrodegang" concernant la musique liturgique.

Annonciation dite "de Palerme" (1475) de Antonello Da MESSINA (1430-1479)

TITRE: Humble Servante du Seigneur.

COTE: VP-248-1

AUTEUR: CFC

COMPOSITEUR: Jacques BERTHIER (1923-1994)

Pour ce qui est des chants à la Vierge Marie, ils n'en manquent pas…

En Occident, la Vierge Marie a toujours été source d'inspiration tant dans le domaine pictural que musical. Pour le répertoire marial, encore plus que pour les autres, les textes peuvent surprendre par la simplicité de leur composition et la teneur poétique. On peut dire que c'est simple et profond !

L'hymne "Humble servante du Seigneur" (VP 248-1) de Jacques BERTHIER, sur un texte de la Commission Francophone Cistercienne en est un bel aboutissement. Attardons-nous sur le texte et la mise en musique.

Analyse textuelle

Il semble assez évident que le texte prime sur la musique. L'hymne est composée de cinq couplets qui reprennent les mystères principaux de la Vierge Marie : L'Annonciation, la Visitation, les Noces de Cana, la mort de Jésus sur la Croix, Marie au milieu des disciples après la Résurrection et la Pentecôte.

La structure interne des couplets mérite que l'on s'y attarde. Chaque couplet est composé de 3 périodes. Une période présente la Vierge Marie (humble servante, terre féconde, mère attentive, femme debout, joie de l'Eglise). Une deuxième période présentant l'action du Dieu, Père et Fils, au sein du mystère évoqué (Dieu choisit, Dieu bénit, Dieu accomplit, Dieu se fait nuit, Christ est vivant). Une troisième période montre ce qui se passe lorsque Marie se présente à Dieu (accueillir le message, le Verbe peut venir dans le monde, manifestation de la gloire, offrir Jésus-Christ, guide vers Dieu).

Dans une certaine manière, la structure du texte est une catéchèse ! On y présente Marie dans sa dimension humaine et croyante, puis ce que Dieu fait, enfin ce qui est réalisé en communion avec l'acte d'offrande de Marie.

Analyse musicale

Pour la musique, Jacques BERTHIER fait correspondre la mélodie à la structure du texte. Il adopte le système des hymnes antiques : pas de distinction couplet/refrain. Il y a une mélodie unique de style choral composée de 3 périodes. Cependant, l'analyse harmonique et rythmique apporte des éléments nouveaux.

Pour ce qui est de l'harmonie, l'hymne est en sol majeur. Cependant Jacques BERTHIER, en l'espace de quelques mesures va déployer l'harmonie en suivant la structure littéraire évoquée au départ. Pendant la première période on commence en sol majeur et on emprunte, par contraste, en mi mineur. La deuxième période est en sol majeur. La troisième fait le même mouvement que la première : on emprunte en mi mineur pour terminer en sol majeur. Ces emprunts mettent deux choses en valeur : ce qui se dit dans la première et la troisième période, mais surtout ils renforcent et accentuent la deuxième période.

Pour ce qui est du rythme, c'est identique. Il suit de près la structure littéraire du texte mais il nous conduit à l'essentiel. Dans la première et la troisième période, la succession des croches rend la mélodie très allante. Le texte se déploie, on a le sentiment d'avancer. Par contraste, la deuxième période n'est faite que de blanches et de noires. Cela donne un sentiment de suspension. Comme si le rythme nous indiquait l'endroit où il faut être très attentif.

Aussi par l'harmonie et le rythme, c'est la deuxième période qui est mise en valeur. Même si le chant est consacré à la Vierge Dieu, c'est l'action de Dieu en elle qui première et que l'on met en lumière.

Conclusions

Cette hymne est donc une belle réussite, tant par la qualité littéraire que par la qualité musicale. Et pourtant la mélodie est simple. La communion d'un texte avec une musique peut nous amener à comprendre bien des choses. Comme pour la Vierge Marie, Dieu agit dans chacune de nos vies, avec ce qu'elles sont. Et avec notre "oui", que de choses peuvent advenir.