Devenir enfant de Dieu, par Lui, avec Lui et en Lui !

Commentaire d’évangile pour le dimanche du Baptême du Seigneur (Lc 3, 15-16.21-22 ; année liturgique C), célébré le dimanche 09 janvier 2022.

Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 07 janvier 2022.

"Le Baptême du Christ" (1580)

de Jacopo TINTORETTO dit "Le Tintoret" (1519-1594)

La fête du Baptême du Seigneur que nous célébrons ce dimanche s’enracine dans toute une histoire de la compréhension de l’être de Jésus-Christ, notamment sa divinité.

Avec Noël et l'Epiphanie, la fête du Baptême du Seigneur fait partie du trépied sur lequel repose le cycle liturgique de Noël se terminant le 2 février par la Présentation de Jésus au Temple. L'incorporation de cette fête au cycle de Noël est un héritage antique de l'Orient. Suite à l'édit de l'empereur Constantin en 313, le culte chrétien devenu culte officiel connut un essor considérable. En 321, grâce à l’empereur, le premier jour de la semaine (dimanche, jour de la lumière, de la Résurrection et de la Pâque hebdomadaire) est devenu férié. Cependant l'un des problèmes majeurs de cette période est l'arianisme, hérésie qui remettait en cause la divinité de Jésus. Son ampleur est telle que l'empereur lui-même convoqua en 325 le premier concile œcuménique de l'histoire à Nicée. Ce dernier entraîna la condamnation de l'arianisme et la réaffirmation de la divinité du Jésus par un formidable élan d'enseignements et de prédications.

Lorsque la fête de Noël fut célébrée pour la première fois à Rome, probablement le 25 décembre 330, sa création se situe dans ce mouvement de réaffirmation doctrinale. Durant le même période (entre 325 et 330) la fête de l'Epiphanie est fixée pour l'Orient au 6 janvier. Elle devait permettre, à travers la mémoire du mystère de l'Incarnation, de réaffirmer la divinité de Jésus-Christ. Sous l’influence de Constantin on choisit pour faire mémoire de la naissance de Jésus-Christ la fête du Natalis invicti introduite récemment à Rome par l'empereur Aurélien (270-275) et fixée par lui au 25 décembre, sans doute le 25 décembre 274 lorsqu'il fit consacrer le Temple au Dieu-Soleil (sol invictus) sur le champ de mars de Rome. La fête du Dies natalis solis invicti est en fait un métissage de plusieurs fêtes antiques ayant des origines à la fois égyptiennes et syriennes. Aurélien l'introduit à Rome pour que le dieu-soleil, au moment du solstice d'hiver, devienne le nouveau restaurateur de l'empire. Avec Aurélien, l'adoption de cette fête orientale atteste qu'un Dieu "étranger" est venu «détrôner » Jupiter et tout le panthéon officiel des dieux romains !

En choisissant la date du 25 décembre (Noël) pour Rome ou le 6 janvier (Epiphanie) pour l'Orient, les chrétiens semblent poursuivre l'idée de détrôner les idoles des cultes païens pour réaffirmer la foi en Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme. La fête du Baptême du Seigneur, proche de la fête de l'Epiphanie, est apparue en Egypte au Vème siècle et depuis le début du VIème siècle, les chrétiens d'Ethiopie célèbrent Timkat où l'on fait mémoire solennellement du Baptême du Seigneur comme une somptueuse Epiphanie. En célébrant le Baptême du Seigneur, l'Occident montre qu'elle a accueilli en son sein, comme un présent des Mages, une pratique étrangère venue d'Orient !

Oui, le Baptême est une Epiphanie ! Après avoir été baptisé Jésus est en train de prier et à un instant indéterminé il vécut un baptême dans le feu annoncé par Jean, puisque l'Esprit descend sur lui et sa divinité est manifestée par le Père. Il le présente au monde comme son Fils éternel ! Par l'évangile, le baptême est une véritable naissance puisque d'après Jean, Jésus nous baptisera dans ce même mystère. Par Lui nous deviendrons « fils de Dieu ». Le baptême dans le feu est l'image de ce que la théologie nommera par « divinisation » : le croyant devient participant de la divinité du Fils. Croire en la divinité de Jésus-Christ, c'est aussi croire que nous pouvons participer à un tel mystère ! Détrôner nos idoles et l'audace de la foi riment avec joyeux Noël !