Par la puissance de son bras... D'honneurs ou de justice?
- bohleremmanuel
- 14 oct. 2022
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile pour le 29ème dimanche du Temps Ordinaire (Lc 18, 1-8 ; année liturgique C), célébré le dimanche 16 octobre 2022.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 14 octobre 2022.

Depuis la libération de l’esclavage d’Egypte et le passage de la Mer Rouge, l’expression « à main forte et à bras vigoureux » décrit avec éloquence l’œuvre de Moïse. Si ce dernier institua les Juges (Ex 18,13-27 ou Dt 16, 18-20), celui de l’évangile a-t-il la même superbe ?
Ce sont les psaumes, en particulier le Psaume 135 (136), qui décrivent et déploient avec le plus de magnificence l’action de Moïse en faveur de son peuple. Ce sont eux qui mettent en lumière son « bras » par lequel se manifeste la Force de Dieu et l’action de Dieu.
Si le « bras » de Moïse devient le signe par lequel se manifeste et se communique la Force de Dieu, il faut bien reconnaitre que ce mystère dépasse totalement ses forces humaines. On peut alors mieux comprendre le récit de l’Exode (Ex 17,8-13) où il y a la nécessité d’Aaron et de Hour pour aider Moïse à étendre les bras afin d’être victorieux. Si l’image de cette scène a des aspects comiques, en est-il de même dans l’évangile ?
L’évangéliste Luc n’est pas tendre en décrivant ce Juge : il s’agit d’un authentique pamphlet. D’ailleurs l’évangéliste nous demande d’être particulièrement attentif aux « révélations » (Lc 18,4-5) quant au fond de la pensée de ce juge concernant son action, ou plutôt son inaction. Il ne craint pas Dieu, on peut même aller jusqu’à se demander s’il a encore la foi. Il ne respecte pas son prochain et surtout, malgré sa fonction, il n’est plus le père des veuves et des orphelins (Ps 68,5). Il n’écoute plus les supplications de malheureux qui viennent le trouver pour rendre justice. Il n’est plus du tout attentif à son prochain et s’il le fait, c’est uniquement pour préserver sa tranquillité et non plus accomplir son devoir.
Alors que le futur Juge doit être un « homme de valeur, craignant Dieu, digne de confiance, incorruptible » (Ex 18,21), il faut bien admettre qu’il n’y a rien des prescriptions de Moïse dans celui de l’évangile. Il en est même à l’opposé, d’autant que comble de l’ironie ce juge ne juge plus ! Son « bras » n’est plus comparable à celui de Moïse qui communiquait la Force de Dieu. Ce n’est plus un « bras » de Justice, « puissant », « fort » et « vigoureux » comme jadis… Au contraire voilà un homme qui profite du prestige et des honneurs de son état, mais qui au lieu de l’honorer s’enferme dans un confort, se replie sur lui-même et semble totalement anesthésié pour agir en faveur de la Justice. Bref ce n’est plus qu’un « bras »… « d’honneurs » ….
Mais la finale de l’évangile, tout en mettant en lumière la corruption de cette noble institution mosaïque des Juges, appelle à un sursaut de foi et d’espérance. Dieu, Lui seul entendra l’appel et le cri des malheureux (Ps 33,6). La venue de son Fils en est le don : pour répondre aux appels de la détresse humaine, il a abandonné le confort de sa condition divine pour se faire pauvre en demeurant parmi nous. C’est Lui et lui seul le Juge « dont on n’a rien à craindre » comme dit saint Augustin. C’est Lui et Lui seul notre sainteté.
Alors soyons de ses disciples : méditons son exemple à travers l’évangile et imitons-le. Marchons à sa suite sur les chemins de la Justice (Pr 8,20).
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