Prédiction ou prophétie ? Quelles différences pour quelle espérance ?
- bohleremmanuel
- 11 nov. 2022
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile pour le 33ème dimanche du Temps Ordinaire (Lc 21, 5-19 ; année liturgique C), célébré le dimanche 13 novembre 2022.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 10 novembre 2022.

Avec le 33ème Dimanche du Temps Ordinaire nous entrons dans les deux dernières semaines de l’année liturgique dont le ton apocalyptique n’est pas toujours très réjouissant… Et pourtant, allons-nous succomber à la désespérance et marcher dans les ténèbres (Is 9,1) ?
On commence par la contemplation d’une des merveilles du monde : le Temple de Jérusalem. A travers sa beauté, sa splendeur, sa richesse, c’est toute la grandeur et la puissance d’une civilisation que l’on admire. C’est un gage de stabilité qui rassure.
Mais Jésus vient « casser l’ambiance ». Certes il ne critique aucunement le Temple et sa richesse, mais il aide les disciples à prendre conscience qu’il est malgré tout éphémère, vulnérable, temporel… Au fond, quel va être le Roc sur lequel ils pourront bâtir leur maison ? Est-ce un roc temporel ou bien est-il lié à la Grâce et au don de Dieu ?
Dans un deuxième temps, Jésus adopte un ton apocalyptique pour parler de la prochaine destruction du Temple. Bien des exégètes pensent que l’évangile aurait alors été écrit après la destruction du Temple en 70.
Mais à regarder le texte attentivement, ce ton apocalyptique n’est aucunement astrologique. Il ne dit rien d’une datation, ne donne aucun indice pour le calculer : ce n’est pas une prédiction ! Par contre, si Jésus parle de faits précis (les faux-prophètes, les guerres, le désordre, les tremblements de terre, les épidémies, la famine, les phénomènes effrayants) il réutilise des expressions narratives venant des récits apocalyptiques des Prophètes de l’Ancien Testament (Daniel, Ezéchiel). Une lignée d’exégètes pense alors que l’évangile de Luc a pu être écrit avant la destruction du Temple, puisqu’entre -63 et 70, la conscience collective savait plus au moins que le conflit entre juifs et romains conduirait inéluctablement au siège de la ville et à une destruction.
En fait Jésus semble associer cette destruction du Temple avec la fin du Temps au Dernier Jour de la création. Or c’est avec ces mêmes formules que les prophètes de l’Ancien Testament évoquaient l’exil à Babylone. Jésus serait-il en train de préparer ses disciples à vivre un « exil » qui n'aurait pas de lien avec la destruction du Temple ?
Dans la dernière partie de l’évangile Jésus annonce que les disciples seront persécutés, livrés, jugés, détestés et finalement chassés ! Les Actes des apôtres et les lettres apostoliques ne manquent de décrire cette « diaspora culturelle » où les disciples du Christ sont chassés. Si l’Evangile se diffuse dans le pourtour méditerranéen, c’est aussi parce que les premiers chrétiens sont chassés ou doivent vivre clandestinement.
Or pour vivre ce prochain exil, Jésus leur donne une parole prophétique, un unique nécessaire : la force de l’Esprit qui donnera un langage et une sagesse à laquelle les adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer ». La stabilité, le roc sur lequel s’appuyer pour cet exode difficile c’est l’Esprit Saint ! C’est lui qui éclaira leur marche difficile. C’est lui qui les embrasera de charité et de force pour tenir.
Si le peuple des croyants s’apprête à marcher dans les ténèbres, il voit déjà la grande lumière de l’Esprit.
Si en ce moment l’évangile se rapproche du réalisme de notre quotidien, alors plus que jamais n’oublions pas ce sursaut dans l’Esprit (Is 9,1) !
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