Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin
- bohleremmanuel
- 6 janv. 2023
- 3 min de lecture
Commentaire d’évangile pour le dimanche de l'Epiphanie (Mt 2, 1-12 ; année liturgique A), célébré le dimanche 08 janvier 2023.
Commentaire publié dans le journal hebdomadaire L'AMI HEBDO au sein de l'édition du 06 janvier 2023.
Cette finale du récit de l’Epiphanie est bien connue dans l’Ecriture et place la visite des mages dans un contexte très particulier. Retour sur son utilisation…
Tout se passe à la fin du règne du Roi Salomon (1 R 11,11-13).
Le prophète Ahias de Silo annonce à Jéroboam, fidèle intendant, qu’il sera Roi et que le Royaume se divisera (1 R 11,29-39). Lors de l’intronisation de Roboam, fils de Salomon, dix des douze Tribus vont désigner Jéroboam comme Roi pour fonder le Royaume d’Israël au nord. Seules deux Tribus vont suivre Roboam pour fonder le Royaume de Juda en conservant Jérusalem (1 R 12,19-20).
Coup de théâtre au projet divin, Jéroboam au lieu d’être fidèle et grand comme le Roi David, suscitera la colère du prophète Ahias de Silo entraînant sa chute (1 R 14,7-9) ! En effet Dieu lui envoya un homme juste provenant du Royaume de Juda, pour dénoncer sa trahison envers sa Promesse et le culte idolâtrique qu’il instaura par des prêtres illégitimes à Bethel, le lieu de la Promesse faite à Jacob consacrant la Royauté (Gn 35,12-15). Cet homme juste dénonce la faute de Jéroboam tout en annonçant la future naissance d’un roi venant de Juda pour refonder le Royaume (1 R 13,1-3) ! Mais Dieu lui dit de ne pas manger ni boire ce qui provient de ce lieu perverti et impur, et face à l’insécurité de « regagner Juda par un autre chemin » (1 R 13,9-10). Malheureusement, trompé par un faux prophète, il mourut sur le chemin du retour, immolé par un lion qui se coucha près de sa dépouille en épargnant son âne (1 R 13,24).
De l’annonce de cet homme juste jaillira, quelques générations après, les prophéties d’Isaïe et surtout celles de Michée (Mi 5,2) reprisent par l’évangéliste annonçant la venue du Messie, devant naître à Bethléem.
Ainsi le récit, en apparence si féérique de la venue des mages, n’est pas si enfantin que cela !
Il semble porter un ancrage fort avec l’Histoire Sainte d’après l’Ecriture, et surtout l’épisode de cet homme juste dont on ne connait pas le nom…
Et si l’on succombait à la tentation d’un parallélisme avec l’évangile, qu’est-ce que l’on obtiendrait ?
Suite au premier chapitre centré sur Joseph, justement présenté comme un "homme bon et juste", voilà que les mages, certes de brillants astronomes mais des étrangers et surtout des païens, prendraient également ce rôle de l’homme juste…
Ces païens devenus de véritables envoyés de Dieu annoncent à la ville sainte la naissance d’un roi, et surtout révèlent au Peuple de l'Alliance que l’Ecriture s’accomplie !
Il y a comme un travestissement, un renversement de perspective !
Comme jadis l'homme juste à Bethel, ces mages viendraient-ils à Jérusalem, en Terre Promise comme au sein d'une terre impure et corrompue ? Le roi Hérode serait-il comme Jéroboam : un traitre à la Promesse de Dieu et un idolâtre ? En tous cas, après leur avoir donné le nom de Bethléem suite à la consultation de l'Ecriture, son stratagème pour porter atteinte à la vie de l’enfant n’en est-il pas une réponse ? Le peuple de la Promesse serait-il devenu aveugle aux signes qui révèlent l'accomplissement de l'Ecriture pour que des païens se déplacent pour leur annoncer ?
Il n’y a que l’arrogance outrancière d’un évangéliste pour suggérer des propos aussi féroces contre Jérusalem et la Royauté d'Hérode. Qu'en sera-t-il pour les prêtres du Temple ? La suite de l'évangile nous le dira...
Mais au milieu de tant d’adversité et d’hostilité,
au cœur de cette terre desséchée,
un rejeton a jailli !
Par l’Eglise,
tel un rameau sortant d’une souche,
seule la vie divine peut germer et éclore dans de telles conditions !
Encore aujourd’hui,
dans un monde aussi déréglé,
elle est là !
Alors cherchons-là !
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