Voix des prophètes
- bohleremmanuel
- 18 juil. 2023
- 3 min de lecture
Commentaire du cantique "Voix des prophètes"
Article publié par l’Union Sainte Cécile, dans la revue CAECILIA du Service Diocésain de Pastorale Liturgique et Sacramentelle, de musique et d’art sacré de l’archidiocèse de Strasbourg.
N°03, édition de juillet 2023.

« Buisson ardent » (1958), de Marc CHAGALL (1887-1985)
Fruit d’un travail en couple, Germaine de Lioncourt fut épouse du compositeur Jacques Berthier. La structure poétique et biblique de cette hymne-poème de l’épouse est le fruit d’une exégèse biblique lui permettant de faire advenir un texte très épuré, dont la force poétique n’en altère pas celle de l’Ecriture. Mise en valeur par la structure mélodique et rythmique de la musique de l’époux, l’ensemble nous fait entrer dans une authentique mystique de la Révélation selon la Constitution conciliaire Dei Verbum[1].
Attardons-nous d’abord à la structure poétique.
Cette hymne-poème est déjà trinitaire, car elle composée de trois strophes mettant en lumière chacune des personnes de la Trinité. Chacune des strophes de structure parfaitement identique est composée de deux vers, eux-mêmes subdivisés en trois hémistiches dont voici la composition phonétique des rimes.
1ère strophe mettant en lumière la figure du Père :
A1 (pentasyllabe avec son « ète ») – B1 (quadrisyllabe avec son « ieu ») – C (octosyllabe avec son « ère »)
A2 (pentasyllabe) – B2 (quadrisyllabe) – B3 (hexasyllabe)
2ème strophe mettant en lumière la figure de l’Esprit-Saint :
D1 (son « ôtre ») – E1 (son « i ») – F (son « sage »)
D2 – E2 – E3
3ème strophe mettant en lumière la figure du Fils :
G1 (son « able » - H1 (son « u ») – E4
G2 – H2 – H3
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Ensuite attardons nous à la structure rythmique.
Ecrite en mode de Ré sur Mi, Jacques Berthier composa une ligne mélodique strophique épousant la structuration poétique du texte de sa femme. Il divisa la ligne mélodique de la strophe en deux parties respectant les deux vers : pour le premier nous sommes en mode de Ré authente, quant au deuxième nous sommes plutôt en Ré plagal. Puis il prit pour base les six hémistiches de chaque strophe afin de proposer six cellules mélodiques différentes mais avec des rythmes alternant brèves (b) et longues (L) respectant les parallélismes de tailles. Nous avons ainsi :
Pour A(1-2), D(1-2) et G(1-2) : L-b-b-L-L (orthios)
Pour B(1-2), E(1,-2) et H(1-2) : L-b-b-L (choriambe)
Pour C, F et E4 : L-b-b-L - b-b-L-L (choriambe et ionique mineur)
Pour B3, E3 et H3 : b-L-b-L-L-L (diambe et spondée)
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A ceci remarquons que la structure des trois strophes met subtilement en lumière les trois parties qui rythment la liturgie de la Parole.
Une strophe pour évoquer les lectures de l’Ancien Testament (1ère lecture et psaume) en reprenant des éléments propres au Buisson ardent et au don de la Loi à Moïse où Dieu y révèle son Nom et sa Volonté.
Une strophe pour évoquer les Lettres apostoliques (2ème lecture) en reprenant des éléments propres aux Actes des Apôtres et à la prédication des apôtres dans l’élan de la Pentecôte qui leur ouvre l’intelligence des Ecritures et l’audace missionnaire.
Enfin une strophe pour évoquer l’évangile, parce qu’il donne sens aux sacrements que nous célébrons (en particulier l’Eucharistie) et en même temps il est une boussole pour faire grandir la vertu de vivre en chrétien. Ce chant pourrait très bien servir pendant une homélie pour ouvrir à une mystagogie de la liturgie de la Parole[2] par le célébrant.
Finalement cette hymne-poème met en lumière celui qui a inspiré l’Ecriture : l’Esprit-Saint qui parle à travers le mystère de la voix humaine !
Aussi à travers ce chant durant la liturgie dominicale, c’est une authentique expérience du Buisson ardent qui nous est proposée de vivre, une Pentecôte hebdomadaire, une consécration dans le Verbe, un embrasement dans l’Amour nous faisant déjà entrer dans le mystère de son offrande éternelle au Père.
------------------------------------------------------------------------------------------------------------- [1] Concile Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum n°2-10, 18 novembre 1965 [2] Supplément numérique sous forme de « mystagogie de la liturgie de la Parole » à travers l’expérience du chant « Voix des prophètes ».
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