Recension du livre "La Rupture" d'Yves LEDURE

Diffusée sur les ondes de Radio Jérico. Direct pour la rubrique "Paroles d'Evangile" au sein la matinale de Thierry GEORGES,

Décembre 2010.

Livre paru en librairie en décembre 2010

Je voudrais vous présenter le dernier livre du Père Yves LEDURE « La Rupture » que j'ai trouv, par hasard à Paris, en rentrant vers mon lieu d'hébergement.

L'auteur déjà : Yves LEDURE est prêtre de la congrégation du Sacré Cœur, fondé par le Père Déhon au XIXème siècle, dans la mouvance de l'encyclique sociale Rerum Novarum de Léon XIII, prenant en compte les malaises sociaux de l'ère industrielle.

Professeur de philosophie à l'Institut Catholique de Paris puis au Centre de Pédagogie et d'Enseignement Religieux (CAEPR) à Metz. J'ai eu la chance de l'avoir eu en cours, juste l'année avant son départ à la retraite. Sa réflexion, qui à mon sens fût à l'époque comme un « testament » de sa pensée a été son livre « Christianisme en refondation ». Ouvrage dense et profond sur l'évolution du christianisme face aux questions actuelles en Occident. Il a toujours essayé de penser la place du corps dans la théologie et la philosophie chrétienne.

Homme passionné, attachant, spécialiste de Nietzsche, dont les propos avaient de quoi donner de l'urticaire à tous les biens pensants, coincés ou constipés de l'intelligence, qui aujourd'hui encore hélas, se sentent investit d'une mission dépuration dans l'Eglise et la société.

Il est clair que pour Yves LEDURE, le « Dieu est mort » de Nietzsche est plus la mort d'une conception, d'une perception de Dieu que sa mort même. Son enseignement philosophique était là pour nous permettre de mieux saisir cette pensée, pour la considérer dans la réflexion théologique actuelle.

Lorsque j'avais droit à ses cours, je ne mesurai pas totalement la valeur de l'avoir eu comme professeur... Me souvenant de ses : «... Mais vous ne pouvez pas comprendre!!! » Non pour nous critiquer ou nous rabaisser, mais exprimant la douleur de chaque professeur, qui se rendant compte que ces élèves ne suivent pas, ou n'arrivent pas à suivre... La hauteur du propos exposé ne peut qu'en être affecté !

« RUPTURE », son dernier ouvrage, est un livre qui n'est pas un plaidoyer de superficialité, il met en exergue « l'auto détermination de soi ». Il dénonce l'autorité dictatoriale de la réduction de l'histoire du monde à... « Moi » !!! Où l'on casse cette dernière, en se prenant pour l'origine et la fin du monde... En sommes réduire tout à soi ! Après avoir « désamorcé » cette limite actuelle, il va plus loin.

« Rupture » est un livre rigoureux, libre, parce que n'ayant pas peur de mettre en branle les présupposés trop facilement acquis de l'Eglise, et encore plus facilement annoncés, avec parfois un tel euphorisme plus que douteux, par certains groupe dit de « renouveau ».

C'est un livre où l'on perçoit la volonté et la rigueur philosophique de comprendre et de présenter ce concept « d'auto détermination », à la fois dans l'histoire de la philosophie (Kant et les philosophes des lumières), mais pour reconfigurer autrement le christianisme, en tenant compte de l'anthropologie issue de ce courant de penser.

Après avoir disséqué un article du credo, sur le Dieu Créateur, comme « Tout puissant », il y a « rupture » avec la vision du Dieu dominant et de l'homme dominé.

« Rupture » pour penser philosophiquement la liberté de l'homme à l'égard de Dieu, à partir d'une méditation profonde et rigoureuse de l'Incarnation pour repenser le christianisme et surtout pour dépoussiérer son originalité. L'Incarnation comme redéfinissant la place du corps, la destiné de l'homme et de sa liberté.

« Rupture » propose une philosophie centrée sur l'homme, et uniquement sur l'homme ; mais sans pour autant lui ôter, ce qu'il appelle la « possibilité » du divin. Au cœur de l'expérience humaine, il y a cette « possibilité », cette expérience spirituelle forte, qui ouvre à l'être humain le chemin vers Dieu. Un peu à l'image de Noël, où par la naissance de Jésus, Dieu se fait homme, et par l'expérience humaine qu'il a partagé avec ses disciples, le chemin vers le Père a été ouvert de façon inédite, inouïe.

« Rupture » est un livre de philosophie, mais d'une philosophie quasi narrative, qui se « raconte » au fur et à mesure de la lecture. L'écriture y est simple, rigoureuse et onctueuse, avec plein d'allusions poétiques et artistiques. On suit aisément la progression de la pensée.

En sommes un beau cadeau de Noël, pour mieux saisir l'impact puissant sur la manière dont on considère, dont on pense, dont on traite l'homme d'aujourd'hui, face à ce que le mystère de la Nativité nous en suggère.

« Rupture », propose pertinemment à notre société qui se déshumanise pas à pas, de manière parfois inquiétante, une nouvelle manière de repenser l'homme dans ce qu'il a de plus beau et de plus grand.

Enfin, « Rupture » pointe les impasses de l'évolution historique de la pensée des Lumières, mais essaye d'en sortir. Il la considère comme un acquis irréversible ; l'héritage des Lumières qui cassant le socle de la pensée médiévale précédente en séparant la philosophie de la théologie, ne peut se penser et ne peut aller dans le chaos que dans le rapport de confrontation avec le christianisme.

Il y a un nouvel humanisme à trouver ayant pour socle le dépassement, le désir, le divin (en tant que transcendance a posteriori).

Le père LEDURE propose un christianisme d'Incarnation, d'un humanisme qui ouvre à la transcendance. Voilà une puissante réflexion sur la Nativité... Qu'est-ce que ce sera, lorsqu'il pensera le mystère pascal dans tout cela.... En attendant....

Bonne lecture !