Les fondations pauliniennes du Concile Vatican II
- bohleremmanuel
- 28 nov. 2020
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Cet article a été publié au sein de « Eglise de Metz » la revue officielle du diocèse de Metz, dans l’édition d’octobre 2012. Un dossier a été consacré au 50ème anniversaire de l'ouverture du Concile Vatican II.
Ouverture du Concile Vatican II, le 11 octobre 1962
Avant de choisir un nouveau pape, il convient de mettre en lumière les questions les plus profondes d’une époque… Ce fût le cardinal BACCI, qui le 25 octobre 1958 prononça une homélie d’entrée en conclave.
Ce dernier proposait que le futur pape puisse œuvrer en faveur de la paix entre les nations, en faveur de la liberté religieuse compte tenu des persécutions graves que l‘on pouvait constater (en particulier contre l’Eglise de Chine), enfin en faveur de la question du discernement des informations, suscité par l’émergence d’une culture de « masse médias » diffusant des erreurs doctrinales (problème pour l’évangélisation).
Qui aurait cru que Jean XXIII, en proposant le souhait d’un concile le 25 janvier 1959 lors d’un consistoire extraordinaire, allait tenter de répondre à ces trois questions en même temps !
Ce discours maintenant célèbre n’en cache pas moins une profondeur spirituelle hors du commun, car il se situe dans la continuité d’un autre évènement, complètement oublié celui-là…
Une année jubilaire pour la Lettre de saint Paul aux Romains qui avait lieu entre 1958 et 1959. Ce fameux 25 janvier 1959, non seulement Jean XXIII vient clôturer la Semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens mais il y prononce une homélie pour rendre grâce pour ce jubilé concernant cet écrit paulinien !
Il est frappant de voir le lien intrinsèque entre cette homélie et le discours ouvrant l’aventure du concile !
Constatant la grave dégradation et la compromission de la liberté, Jean XXIII y discerne l’appel pour le Concile et reprend la triple thématique de la Lettre aux Romains (Unité, Vérité, Paix) pour en faire les soubassements enfouis mais solide de la démarche conciliaire !
Selon ses termes, si le Concile devra proposer des « affirmations doctrinales et de sages ordonnancements », ce sera en faveur de la Vérité, de l’Unité et de la Paix !
Cette fondation paulinienne permet à Jean XXIII d’orienter le futur Concile et ainsi synthétiser dans une même démarche, les 3 questions essentielles de son temps.
A partir de la Pentecôte 1959 (17 mai) s’ouvre la phase anté-préparatoire.
Jean XXIII, aidé par une commission va lancer une consultation mondiale auprès de l’épiscopat, des supérieurs majeurs d’ordre, des Universités et facultés de Droit Canonique.
Il rédigera sa première encyclique le 29 juin 1959 « Ad petri cathedram » pour guider cette démarche consultative. Il développe très largement la vision paulinienne exposé précédemment.
Le futur Concile sera en faveur de l’Unité, de la Vérité et de la Paix.
Mais Jean XXIII y adjoint une méditation sur l’Eglise laissant entrevoir le souhait que le Concile puisse être une « manifestation » de l’Eglise.
Lorsqu’à la Pentecôte 1960 (5 juin), Jean XXIII clôturera la phase anté-préparatoire et propulsera la phase préparatoire, il va déployer cette conscience ecclésiale, surtout dans sa dimension mondiale et universelle !
Contrairement à une relecture idéologique post conciliaire qui aujourd’hui encore sévit et fait croire que tout était l’oeuvre exclusive de la curie romaine, la phase préparatoire tente de correspondre à cette conscience ecclésiale voulue par Jean XXIII.
N’oublions pas que la Commission Centrale qui va voter les futurs schémas: 75% de ses membres sont issus des diocèses qui sont hors de l’Europe. Sur les 25 % qui proviennent de l’Europe, la Curie est très loin d’être majoritaire.
Pour les 10 commissions et les 2 secrétariats, c’est l’inverse avec 75% d’européens et 25% du reste du globe. Même si 75% sont européens, la Curie n’est pas majoritaire au détriment de pays limitrophes autour de la France.
Le 13-14 novembre 1960, Jean XXIII inaugure officiellement la phase préparatoire qui durera jusqu’au 23 juin 1962.
Lors de cette inauguration, où Jean XXIII est en présence de l’ensemble des membres de la Commission Centrale, des 10 commissions et des 2 secrétariats (ce qui fait 697 personnes au total) il y fait une homélie profondément ancrée dans la dimension « mystérique » de l’Eglise, à partir de ses 4 dénominations : Une, Sainte, Catholique, Apostolique.
Nous voyons bien que l’élan de travail de la phase préparatoire s’enracine, de manière cachée, sous un angle ecclésial !
A travers cette phase préparatoire, le Concile se prépare bien à être une «épiphanie du mystère de l’Eglise».
Le travail de Jean XXIII est « travail en profondeur ».
Nous lui devons ces 2 fondations : l’enracinement dans l’Ecriture, en particulier la Lettre aux Romains et son enracinement dans le mystère même de l’Eglise.
Paul VI, à sa manière a bien repris les 2 fondations de son prédécesseur. Nous les retrouverons exprimées en particulier lors de la 3ème session du Concile. Cette dernière, ayant eu lieu du 14 septembre au 21 novembre 1964, est de loin la plus aboutie et la plus prodigieuse par rapport à la cohérence interne de ses 3 publications : la constitution dogmatique « Lumen Gentium », le décret sur les Eglises orientales « Orientalium ecclesiarum », le décret sur l’œcuménisme « Unitatis Redintegratio ».
Cette 3ème session pourrait volontiers être surnommée « session sur le mystère de l’Eglise ».
Ces 2 fondations pourraient servir de base pour vivre cette « Année de la Foi ».
Déjà redécouvrir chaque jour le mystère de l’Eglise au sein de laquelle nous vivons et que bien souvent nous ne comprenons pas.
N’oublions pas que c’est « en Eglise » que nous pouvons confesser la foi.
La confession de foi n’est pas une démarche uniquement individuelle, mais avant tout ecclésiale.
Nous pourrions également relire, étudier, prier avec la Lettre aux Romains, qui rend bien compte de ce qu’est « l’acte de croire ».
Alors… Bonne année!!!
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